42

Le pilote du Gulfstream regarda son écran de navigation avec attention. L’itinéraire qu’il allait emprunter ne lui laissait qu’une faible marge d’erreur. Il survolait un petit couloir de l’espace aérien indien qui passait entre le Bangladesh et le Népal. La zone en question ne faisait qu’une trentaine de kilomètres de large en son point le plus étroit. La terre au-dessous était ardemment revendiquée par les trois pays.

Doucement, il fit virer le Gulfstream vers la gauche.

— Monsieur, cria-t-il en se tournant vers l’arrière, nous avons fait le plus dur !

Le Gulfstream se trouvait à présent dans un couloir plus large entre le Népal et le Bhoutan.

— D’ici combien de temps atteindrons-nous l’espace aérien du Tibet ? demanda Cabrillo.

Le pilote consulta l’écran de son GPS.

— Dans moins de cinq minutes.

Juan Cabrillo aurait dû ressentir une lassitude extrême, mais ce n’était pas le cas. Il regarda par la fenêtre le terrain montagneux au-dessous de lui. Le soleil se levait dans un rougeoiement duveteux de roses et de jaunes. Le Tibet était juste là, devant. Il s’empara de son téléphone sécurisé et composa un numéro.

À Pékin, le président Hu Jintao fut réveillé de bonne heure. Les événements de la place Barkhor n’étaient pas passés inaperçus. Jintao se leva rapidement, s’aspergea d’eau et descendit, encore en robe de chambre.

— Quelle est la situation ? demanda-t-il sans préambule à un général.

— Tout est en place, monsieur le Président, déclara le général, mais la colonne de blindés russes a commencé à passer en Mongolie. Leur ambassadeur nous assure qu’il ne s’agit que d’un exercice entre la Mongolie et la Russie. Mais au train où ils vont, ils pourraient pénétrer en Chine par les montagnes de l’Altaï et le bassin du Tarim dans les prochaines heures.

— Et l’aviation ?

— Ils ont plusieurs unités de parachutistes qui se tiennent prêtes en Russie, dit le général. Nos satellites ont détecté des avions de transport de troupes qui se déplaçaient sur le tarmac. Pour le moment, aucun appareil n’a quitté le sol.

Jintao se tourna vers le ministre des Affaires étrangères.

— Nous n’avons pour l’heure aucun différend avec la Russie, dit-il. Pour quelle raison pourraient-ils vouloir lancer une attaque à notre frontière ?

— En ce moment, nos relations sont pacifiques.

— Très étrange, fit Jintao.

— L’ambassadeur de Russie a sollicité un entretien à dix heures ce matin, ajouta l’homme. Cette requête est arrivée dans la nuit par un canal prioritaire.

— A-t-il précisé le motif de cette requête ? demanda Jintao.

— Non, répondit le ministre.

Jintao réfléchit un instant.

— Monsieur le Président, intervint le général, ce n’est pas tout. Nous venons de recevoir des rapports de la capitale du Tibet et une manifestation s’est formée sur une des places les plus importantes de Lhassa.

— Qu’en pense le président de la région ?

Le général mit un peu de temps à répondre.

— C’est-à-dire, monsieur le Président, que c’est justement le problème. Il nous a été impossible de joindre Legchog Zhuren.

— La vache, Gurt ! s’exclama Murphy. Là, c’est pas passé loin !

— Je pense qu’une des balles a touché le circuit hydraulique qui contrôle notre équilibre. Et moi j’ai été touché à l’épaule gauche.

— C’est grave ? demanda vivement Murphy.

— Oh, il peut voler, répondit Gurt, mais ce sera un peu risqué.

— Je parle de toi, imbécile ! tonna Murphy. Tu es gravement blessé ?

Gurt descendait de la passe à travers une importante couverture nuageuse. Le nez de l’hélicoptère était pointé vers le bas et les hommes étaient comprimés dans leurs harnais.

— Accroche-toi, dit Gurt, je vais me pencher en avant pour que tu puisses regarder.

Gurt éloigna son torse du dossier de son siège et Murphy se pencha pour regarder, puis il tendit la main pour tâtonner autour. Quelques secondes plus tard, il retira une balle aplatie de la garniture du siège.

— La balle a traversé proprement et elle a été arrêtée par l’armature métallique du siège, dit Murphy, mais tu perds du sang.

— Ça ne me faisait pas mal jusqu’à maintenant, admit Gurt. Je pense que l’adrénaline m’a empêché de le remarquer.

— Il va falloir que je fasse un garrot, dit Murphy. Attends, je passe un coup de fil.

Il prit sa radio et appela L’Oregon.

— Calez ça ici, déclara Gunderson, mais assurez-vous que les cartouches vides tombent dehors. Je ne veux pas de douilles brûlantes qui se baladent dans la cabine.

Le Dungkar qui assistait Gunderson hocha la tête. Dix minutes plus tôt, ils avaient détaché une mitrailleuse antiaérienne de son socle et l’avaient installée dans l’avion-cargo pour en faire un avion de combat artisanal. Les soldats travaillaient avec rapidité, comme ceux positionnés à l’autre extrémité du hangar.

George Adams regarda les Dungkar remplir les réservoirs d’essence de l’hélicoptère de combat. Au cours des dix dernières minutes, il avait essayé de se familiariser avec les commandes et les systèmes d’armement de l’appareil. À présent, il était convaincu qu’il pouvait piloter l’engin ; se servir des armes, en revanche, resterait plus hasardeux.

— Bienvenue à la Dungkar Airforce, dit Gunderson en s’approchant. On arrive, vous allez mourir.

— Comment ça se passe, là-bas ? demanda Adams en souriant.

— Je ne sais pas trop, avoua Gunderson. Nous avons installé la mitrailleuse à l’arrière et elle est calée avec assez de planches pour construire une grange ; si elle ne tombe pas de l’avion dès le premier tir, ça devrait bien se passer. Et de ton côté ?

— Monsieur le Chinois est un peu rouillé, dit Adams. À peu près aussi rouillé qu’un navire au fond de l’océan. Mais je pense que je peux le piloter.

Gunderson hocha la tête.

— Si on faisait un pacte, vieux ?

— Lequel ? demanda Adams.

— Une fois là-haut, dit Gunderson, essayons de ne pas nous descendre mutuellement.

Il tourna les talons et regagna l’avion-cargo.

— Bonne chance ! lança-t-il par-dessus son épaule.

— À toi aussi ! répondit Adams.

À ce moment-là, la porte se leva, le soleil et la fraîcheur pénétrèrent dans le hangar. Une minute plus tard, l’hélicoptère de combat était transféré sur le tarmac et une voiturette était attachée à l’avion-cargo pour le remorquer jusqu’à la piste.

Bouddha d'or
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