DICTIONNAIRE DES AUTEURS
BRUNNER (JOHN). – Né en 1934, Brunner a été un des auteurs les plus précoces de la science-fiction anglaise, vendant son premier roman à dix-sept ans à un éditeur de son pays, et sa première nouvelle à Astounding à dix-huit ans. Depuis lors, il s’est consacré à une carrière littéraire, bien qu’ayant exprimé à plusieurs reprises son amertume devant les difficultés que rencontre celui qui a décidé de ne vivre que de sa plume. Après avoir écrit plusieurs romans qui se rattachent plus ou moins au genre du space-opera, il s’est surtout consacré à des récits où ses préoccupations psychologiques et sociales se fondent sur des extrapolations de caractères actuellement discernables de nos collectivités. Il s’attache en général à montrer au lecteur l’ensemble des forces en jeu dans les collectivités qu’il décrit. Pour cela, il recourt soit à une multiplication des points de vue narratifs, soit à une édification particulièrement méticuleuse des décors. Il fait rarement la leçon, et ne cherche pas à transmettre un message unique. La part du pessimisme et de l’optimisme, dans sa vision, peut varier d’un récit au suivant. En 1964-65, il fit paraître The whole man et The squares of the city (La ville est un échiquier), qui marquent un tournant définitif dans sa carrière. Le premier roman présente un télépathe contrefait qui réussit à s’assumer progressivement, tandis que le second met en scène deux hommes politiques d’Amérique latine qui règlent leurs comptes à travers une partie d’échecs dont les coups se répercutent, grâce à des techniques de perception subliminale, sur le destin de leurs partisans respectifs auxquels ils ont attribué le rôle des pièces et des pions. Stand on Zanzibar (1968, Tous à Zanzibar) présente un sombre avenir où la Terre est surpeuplée jusqu’à l’étouffement, en utilisant des techniques narratives empruntées à John Dos Passos. The jagged orbit (1969, L’orbite déchiquetée) considère les interactions entre des complexes industriels, commerciaux et autres dans un avenir où la violence publique est devenue courante. Des raisons de santé ont contraint John Brunner à ralentir son activité après 1975.
CHARNOCK (GRAHAM). – Cette signature est apparue un petit nombre de fois depuis 1969, d’abord en Angleterre, puis aux États-Unis, dans quelques revues et recueils de récits.
DORMAN (SONYA). – Née en 1924, Sonya Dorman entreprit des études d’agronomie et exerça des professions diverses – directrice de chenil, dame de réception, cuisinière, danseuse… – avant de se mettre à écrire, à près de quarante ans, des récits de science-fiction et de fantastique dont les meilleurs se distinguent par leur causticité, leur touche de sinistre et leur humour. Elle s’intéresse aux caractères plutôt qu’aux décors. Elle écrit également des poèmes.
FARMER (PHILIP JOSÉ) – Né en 1918, Philip José Farmer travailla pour une compagnie d’électricité, puis pour une entreprise métallurgique, après avoir terminé son collège. Suivant des cours du soir, il obtint en 1950 une licence ès lettres et se lança alors dans une carrière littéraire. Dans le monde de la science-fiction, il apparaît comme une sorte de Janus, regardant à la fois dans deux directions opposées. Il s’est courageusement attaqué, d’une part, à des sujets naguère tabous dans le récit d’anticipation : dans The lovers (Les Amants étrangers), écrit en 1952 et profondément remanié en 1961, il évoque des rapports sexuels entre êtres d’espèces différentes ; dans Attitudes (1952) et dans d’autres récits rattachés au même cycle, il a considéré la place du missionnaire dans une civilisation dominée par le voyage spatial. D’autre part, Philip José Farmer a donné une dimension nouvelle au récit d’aventures dans la science-fiction, en concevant des univers littéralement créés sur mesure par des héros-dieux qu’il a mis en scène dans le cycle s’ouvrant par The Maker of Universes (1965, Créateur d’Univers). Animé par un même souci de pousser aussi loin que possible les limites de son décor, il a imaginé dans le cycle de Riverworld (1965, Le Fleuve de l’Éternité) la résurrection de tous les hommes de toutes les époques sur une planète géante. Philip José Farmer a également écrit la biographie suivie de quelques personnages romanesques, qu’il s’est diverti à reconstituer d’après les récits où ces héros avaient été mis en scène : Tarzan et Doc Savage furent les premiers sujets de ces biographies para-romanesques. Farmer s’est aussi amusé à mettre en présence des personnages créés par des auteurs différents – Sherlock Holmes avec Tarzan, Hareton Ironcastle avec Doc Savage, Phileas Fogg avec le professeur Moriarty. Il a justifié ses libertés en inventant la chute d’une météorite dans le Yorkshire, en 1795, météorite qui aurait provoqué des mutations chez les cochers et les passagers de deux diligences qui se trouvaient alors dans le voisinage immédiat du point de chute : Farmer a fait de nombreux personnages littéraires célèbres les descendants de ces voyageurs. Ce goût de l’écrivain pour l’interpénétration du réel et du fabulé se distingue aussi par l’introduction de ses alter egos dans l’action, généralement reconnaissables par leurs initiales identiques à celles de l’auteur : Paul Janus Finegan, alias Kickaha, dans le cycle de The Maker of Universes, Peter Jairus Frigate dans celui de Riverworld. De même, Farmer s’est amusé à utiliser pour son roman dans Venus on the half-shelf (1971) la signature de Kilgore Trout – lequel Trout est un écrivain imaginé par Kurt Vonnegut Jr.
KNIGHT (DAMON). – Né en 1922. Débuts en 1941. A raconté, dans The Futurians (1977), ses expériences au sein du groupe d’amis new-yorkais qui vivaient plus ou moins en communauté et d où devaient sortir plusieurs des principaux auteurs, éditeurs et anthologistes de sa génération. Se fait connaître en 1945 par un éreintement ultérieurement célèbre du Monde des non-A de van Vogt, alors à l’apogée de sa gloire. Professant que la science-fiction doit être jugée à ses qualités d’écriture comme le reste de la littérature, il devient un critique célèbre et la publication d’un recueil de ses articles (In Search of Wonder, 1956, édition complétée en 1967) fait figure d’événement. En tant qu’écrivain, il applique ses propres théories, produit assez peu et apporte beaucoup de soin à la composition de ses histoires. Dans les années soixante, la « Nouvelle Vague » salue en lui un précurseur et son goût triomphe temporairement partout, ce qui lui vaut une belle carrière d’anthologiste commencée avec A century of Science Fiction (1962) et couronnée par la série des Orbit (deux recueils par an approximativement depuis 1962) qui ne publie que des nouvelles originales et contribue avec les Dangerous visions de Harlan Ellison à implanter aux États-Unis le courant moderniste né en Angleterre. Depuis lors, Damon Knight a été moins actif comme écrivain et critique que comme anthologiste et animateur. Il organisa les Milford Science Fiction Writers Conférences, et contribua à la fondation des Science Fiction Writers or America dont il fut le premier président (1965-66). Un numéro spécial lui a été consacré, en novembre 1976, par The Magazine of Fantasy and Science Fiction.
KORNBLUTH (CYRIL M.). – Après avoir travaillé pour une agence de presse, C.M. Kornbluth (1923-1958) publia son premier récit en 1940 et se consacra à la science-fiction. Doué dès ses débuts d’une grande facilité, il put compenser les effets de la mobilisation de ses confrères plus âgés : il lui arriva en effet d’écrire pratiquement à lui seul, sous divers pseudonymes, des numéros entiers de certains périodiques dont les forces rédactionnelles avaient été « décimées » par les appels sous les drapeaux. Il commença en 1949 une deuxième carrière, écrivant cette fois sous son propre nom. Il collabora notamment avec Frederick Pohl, en particulier pour écrire The space merchants (Planète à gogos, 1953), roman devenu rapidement classique par son évocation de l’hypertrophie future de la publicité et de ses pouvoirs. C.M. Kornbluth avait une réputation de solitaire, au caractère renfermé, et ses nouvelles reflètent souvent une vision pessimiste du monde – ce pessimisme allant de l’ironie désinvolte à l’amertume mordante et désespérée. Les romans qu’il rédigea avec des collaborateurs – Frederick Pohl principalement, parfois Judith Merril – laissent souvent percer l’influence modératrice de leur co-auteur. Un récit qu’il avait écrit avec Frederick Pohl, The meeting, a reçu un Hugo comme meilleure histoire courte ex-œquo pour l’année 1973 – quinze ans après le décès de Kornbluth.
LAFFERTY (RAPHAËL ALOYSIUS). – Né en 1914, R.A. Lafferty donna à Judith Merril (dans The year’s best s.-f., 11e série) les notes suivantes en guise d’esquisse d’autoportrait : « Si j’avais eu une biographie intéressante, je n’écrirais pas de la science-fiction et du fantastique pour l’intérêt de remplacement. Je suis, dans le désordre, quinquagénaire, célibataire, ingénieur électricien, corpulent ». S’étant mis tardivement à l’activité d’écrivain, Lafferty a rapidement montré qu’il ne ressemblait à aucun autre auteur. Ses idées n’appartiennent qu’à lui, et il en va de même de son style narratif, qui peut paraître bâclé et mal équilibré de prime abord, mais qui possède en réalité une vivacité et une souplesse rythmique peu communes. Dans les univers de Lafferty, l’absurde et l’impossible peuvent se succéder sans attirer l’attention des personnages, ni heurter le lecteur. Ils suffisent, avec les étincelles d’une imagination infatigable, à justifier des récits où il n’y a ni message, ni confession. Parmi ses romans, Past master (1968) met en scène Thomas More, appelé dans le futur pour résoudre les problèmes d’une société qui devrait être utopique – thème qui donne un aperçu de la manière dont agit la « logique » de l’auteur. Ce dernier est cependant encore plus à l’aise dans le genre de la nouvelle, dont Does anyone else have something further to add (1974, Lieux secrets et vilains messieurs) offre un bon recueil. R.A. Lafferty ne fera certainement pas école – il est trop inimitable pour cela – mais sa conversion de l’électronique à la littérature s’est traduite pour la science-fiction par un enrichissement aussi substantiel qu’imprévisible : une nouvelle forme delà rationalisation de la démence.
LEIBER (FRITZ). – Fils d’un acteur de théâtre et de cinéma qui eut son heure de célébrité dans les années vingt, et qui portait le même prénom que lui, Fritz Leiber Jr. naquit en 1910 et découvrit très tôt le théâtre de Shakespeare dans les tournées de son père. Il obtint une licence en philosophie en 1932, essaya divers métiers dont celui de prédicateur religieux et celui d’acteur dans la troupe de son père. Débute en 1939 dans Unknown, l’excellente mais éphémère revue de fantastique que John W. Campbell Jr., dirigeait parallèlement à Astounding, et où il publia les premières aventures héroïques du Grey Mouser et de Fafhrd (Le cycle des épées, Le livre de Lankhmar). En même temps paraissaient dans Weird Tales des nouvelles fantastiques comme The Hound (1940) sur « les êtres surnaturels d’une cité moderne ». Enfin il passa au roman avec Conjure Wife (1943, Ballet de sorcières) puis Gather, darkness ! (1943, À l’aube des ténèbres) et Destiny times three (1945) ; dans ces deux derniers récits, il se convertit à la science-fiction, mais comme à regret et en conservant de nombreuses références à la sorcellerie. En mai 1945, il devient co-rédacteur en chef de Science Digest et s’arrête d’écrire. De 1949 à 1953, il signe une série de nouvelles sarcastiques pour Galaxy, dont Coming attraction (1951) et The Moon is green (1952, La lune était verte). Cette double activité professionnelle finit par le mener à la dépression ; il se met à boire, et tout finit par une cure de désintoxication. Enfin il quitte Science Digest en 1956 et recommence à publier en 1957. Cette troisième carrière est de beaucoup la plus brillante, avec notamment deux romans qui obtiennent le prix Hugo : The Big Time (1958, La Guerre dans le néant) et The Wanderer (1964, Le Vagabond). Fritz Leiber est peut-être, avec Theodore Sturgeon, l’auteur le plus original de sa génération : son ton inimitable, où l’horreur et l’humour font pour une fois bon ménage, lui a souvent valu d’être incompris dans le passé et ce n’est que depuis les années soixante qu’on lui rend pleinement justice. Le numéro de juillet 1969 de The Magazine of Fantasy and Science Fiction lui a été consacré.
MOORE (CATHERINE LUCILE). – Née en 1911. Profondément marquée par la lecture de Frank L. Baum et d’Edgar Rice Burroughs, qui lui donne un goût très vif pour le merveilleux. Son coup d’essai, Shambleau, publié dans Weird Tales en 1933, est un coup de maître. Elle fait paraître dans Weird Tales les aventures de Northwest Smith (personnage de Shambleau), qui relèvent du space-opera, et celles de Jirel de Joiry, qui relèvent de l’heroic fantasy.
Sa production se ralentit beaucoup à la fin des années trente, puis s’arrête presque complètement en 1940 quand elle épouse Henry Kuttner et devient sa collaboratrice pour des histoires signées Lewis Padgett ou Lawrence O’Donnell. Elle signe cependant encore une demi-douzaine de nouvelles et deux romans, Judgment Night (1943, La Nuit du Jugement) et Doomsday Moming (1965, La dernière aube). Elle se laisse ensuite absorber par des scénarios pour la télévision et des cours de technique littéraire qu’elle donne à l’Université de Californie.
NELSON (ALAN). – Auteur d’une demi-douzaine de nouvelles publiées par The Magazine of Fantasy and Science Fiction entre 1951 et 1954 et caractérisées en général par leur ton humoristique.
POHL (FREDERICK). – Né en 1919, Frederick Pohl a pratiquement tout fait dans le domaine de la science-fiction (à l’exception, semble-t-il, du travail d’illustrateur). Il a été, successivement ou simultanément, agent littéraire, rédacteur en chef de magazines (notamment de Galaxy, entre 1961 et 1969), critique de livres, éditeur d’anthologies, conférencier et auteur. Dans cette dernière activité, il s’est longtemps caractérisé par sa verve satirique et par une sorte d’efficience méthodique, qui l’a poussé à toujours exploiter aussi totalement que possible les implications d’un thème, d’une situation – d’une idée en général. Il collabora souvent avec Cyril M. Kornbluth, et a signé avec lui en 1953 le plus célèbre roman auquel son nom reste attaché, The Space Merchants (Planète à gogos). The Magazine of Fantasy and Science Fiction lui a consacré-un numéro spécial en septembre 1973. En tant que romancier, Pohl donna ses meilleures œuvres relativement tard. Il obtint en 1977 le prix Nebula pour Man-Plus (Homme-Plus), où il raconte sans complaisance l’histoire d’un humain transformé pour pouvoir survivre sur Mars. En 1978, il obtint le Nebula et le Hugo pour Gateway, qui combine les motifs de l’exploration interplanétaire, de la psychanalyse et de la survie stochastique. Il a été président des Science Fiction Writers of America en 1974-76. Frederick Pohl a évoqué ses souvenirs d’écrivain dans un chapitre de Hell’s cartographers (1975), publié par Brian W. Aldiss et Harry Harrison, ainsi que dans une autobiographie, The way the future was (1978).
REED (KIT). – Pour l’officier d’état civil, Lilian Reed, née (en 1932) Craig. Journaliste, enseignante, auteur de récits, fantastiques, réalistes, et de science-fiction. Dans les meilleurs de ces derniers, elle présente, sur un ton généralement paisible et sans prétention, des fables morales où l’élément scientifique reste subordonné à l’importance des problèmes humains.
SILVERBERG (ROBERT). – Né en 1936. De son passage à l’Université Columbia, il a gardé des goûts littéraires classiques (Eliot, Yeats). Débute en 1954. Très fécond, il se spécialise dans la production en série (plus de 200 titres publiés jusqu’en 1960, sans compter les nouvelles signées de pseudonymes), ce qui ne l’empêche pas de recevoir en 1956 le prix Hugo décerné au « jeune auteur le plus prometteur ». De 1960 à 1965, il tourne le dos à la science-fiction et devient résolument polygraphe : romans pornographiques, livres pour la jeunesse, vulgarisation historique et scientifique, tout sort de sa machine à écrire, y compris un livre sur la fondation de l’État d’Israël, If I forget thee, O Jérusalem. Il revient à la science-fiction en 1965 et joue un rôle important dans la « Nouvelle Vague », comme critique de livres à la revue Amazing, président des Science Fiction Writers of America (1967-68) et anthologiste (New Dimensions, à partir de 1971). Ses ouvrages les plus importants sont surtout des romans : Thorns (1967, Un jeu cruel), The man in the maze (1968, L’homme dans le labyrinthe), Nightwings (1968-69, Roum, Perris, Jorslem ou Les ailes de la nuit), The world inside (1971, Les monades urbaines), Son of man (1971, Le fils de l’homme), The book fo skulls (1972). Les rééditions récentes de plusieurs de ses romans portent des introductions originales de Silverberg, lesquelles font connaître les modes de penser d’un auteur qui a su passer de l’etat de polygraphe à celui d’écrivain authentique. Elles portent aussi, sur leur couverture, un jugement d’Isaac Asimov : « Là où Silverberg va aujourd’hui, le reste de la science-fiction suivra demain. » En avril 1974, The Magazine of Fantasy and Science Fiction consacra un numéro spécial à Robert Silverberg. Silverberg exprima à plusieurs reprises le désir de s’éloigner définitivement de la science-fiction. Mais en décembre 1979, The Magazine of Fantasy and Science Fiction commença à publier en feuilleton un nouveau roman de lui, Lord Valentine’s castle.
STURGEON (THEODORE). – Pseudonyme d’Edward Hamil-ton Waldo, né en 1918 d’une famille installée en Amérique depuis le XVIIe siècle et comptant beaucoup de membres du clergé. Mère divorcée en 1927 et remariée en 1929 avec un nomme très autoritaire qui interdit les magazines de science-fiction à son beau-fils. Débuts en 1939 ; publie surtout du fantastique dans Unknown, accessoirement de la science-fiction dans Astounding. Lancé par It (Unknown, 1940), il reste pourtant un auteur maudit à cause de ses tendances morbides : le célèbre Bianca’s Hands (Les Mains de Bianca), écrit en 1939, ne parut qu’en 1947. La mobilisation, puis le divorce (1945), le réduisirent au silence. John W. Campbell Jr., l’ayant aidé à sortir de la dépression, il reprend sa collaboration à Astounding et confie ses textes fantastiques à Weird Tales ; il n’écrit plus alors que des « histoires thérapeutiques », c’est-à-dire centrées sur un personnage de malade et cherchant comment on peut le guérir. Surtout connu comme auteur de nouvelles, il a néanmoins écrit deux excellents romans, The Dreaming Jewels (1950, Cristal qui songe) et More than Human (1954, Les plus qu’humains). Malheureusement, il reste psychologiquement vulnérable : un deuxième divorce l’ébranlé à peine en 1951, mais la rupture de son troisième mariage l’atteint plus profondément à la fin des années cinquante ; il cesse d’écrire de la science-fiction, vit à l’hôtel et travaille pour la télévision, ne répondant ni à son courrier ni au téléphone. À la suite d’un quatrième mariage en 1969, il reprend espoir et se remet à écrire. Bien qu’il soit un auteur instinctif, écrivant d’un seul jet sans se corriger, il est fort admiré par la « Nouvelle Vague » pour son sens du bizarre et son désir de comprendre et surtout de ressentir les émotions les plus singulières de ses personnages. Il a été critique de livres pour la National review et Galaxy notamment. The Magazine of Fantasy and Science Fiction lui a consacré un numéro spécial en septembre 1962.
TIPTREE (JAMES JR.). – Pendant plusieurs années, ce fut là le pseudonyme le plus énigmatique de la science-fiction américaine. Il apparut pour la première fois en mars 1968 dans Analog, avec Birth of a salesman, et ce ne fut qu’en 1977 qu’on apprit qu’il avait dissimulé Alice B. Sheldon, une psychologue née en 1915, qui avait vécu en Afrique et aux Indes, et qui travailla longtemps pour le gouvernement des Etats-Unis. Dès le début, ses récits attirèrent l’attention par la compassion avec laquelle les personnages étaient décrits. Rétrospectivement, on y distingua aussi un point de vue féminin… En 1978, elle fit paraître son premier roman, Up the walls of the world (Par-delà les murs du monde), à la fois space-opera, fantasmagorie extraterrestre et exploration parapsychi-que.
WOLFE (GENE). – Né en 1931. Ingénieur diplômé, rédacteur d’un magazine professionnel spécialisé. Ses récits unissent une minutieuse attention envers la science à une écriture précise, évitant les effets brutaux. Sa trilogie The lsland of Doctor Death, The Death of Doctor lsland (Nebula pour la meilleure nouvelle de 1974) et The Doctor of Death lsland (1970-78) joue sur les relations entre le monde réel et l’imaginaire, à travers un emprisonnement suggéré par les permutations des mots dans les titres. The fifth head of Cerberus (1972, La cinquième tête de Cerbère) réunit trois nouvelles en un récit de colonisation planétaire utilisant les motifs des extraterrestres, de l’ethnologie et des clones. Gene Wolfe est un auteur original, profond, qui mériterait d’être plus largement lu – et relu.