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Peu de petites villes au Canada avaient connu le même essor que Little Rock, en Colombie-Britannique. En deux ans à peine, cette petite communauté presque entièrement à la charge de l'aide sociale s'était transformée en une véritable cité médiévale, digne de celles d'Europe. Des milliers de visiteurs s'y arrêtaient maintenant, surtout l'été, pour y vivre des expériences uniques dans ses rues étroites, ses auberges, ses fêtes champêtres et ses tournois entre chevaliers. Mais ce qui étonnait le plus les économistes, c'était qu'un seul homme était l'auteur de ce miracle.
Astrophysicien à l'emploi de la NASA, d'abord en Californie, puis au Texas, Christopher Dawson avait scellé son destin lorsqu'il s'était lié d'amitié avec un de ses collègues, un savant Hollandais qui pouvait créer de puissants systèmes de propulsion, uniquement au moyen de formules mathématiques. Dawson était loin de se douter que les interminables parties de Donjons et Dragons qu'il avait jouées avec Terra Wilder allaient le plonger dans cette extraordinaire aventure.
Croyant qu'il s'agissait d'un nouveau jeu, Terra et Christopher avaient accepté de se joindre à un ordre secret de chevalerie, qui réunissait ses membres régulièrement à Galveston. Ils avaient vite déchanté, car le groupe se prenait au sérieux et obéissait à des règles strictes. Ces hommes, pour la plupart très riches, ne s'étaient pas seulement donnés les noms des légendaires chevaliers de la Table ronde, ils menaient aussi une véritable lutte contre les forces du Mal.
Armés de leur esprit critique, les deux astrophysiciens s'étaient d'abord contentés d'observer leurs nouveaux frères d'armes. Puis, sans s'y attendre, Terra avait été couronné roi, et pas n'importe lequel : on lui avait donné le nom d'Arthur ! Il jouissait cependant de peu de privilèges. Tout comme les autres membres de l'ordre, il était tenu d'assister aux nombreux banquets et aux périodes de formation en escrime ancienne. Malheureusement, le Hollandais n'avait jamais eu le loisir de se perfectionner dans les arts de la guerre. Un terrible accident de voiture lui avait ravi plusieurs années de sa vie.
Tandis que Terra reposait entre la vie et la mort à l'hôpital militaire, Christopher Dawson avait eu son lot de préoccupations. Au moment de son adoubement, on lui avait donné le nom de Galahad, le chevalier parfait. L'ordre ne s'attendait à rien de moins de sa part. Sous la tutelle du chevalier Lancelot, Galahad avait découvert la véritable raison de la création de ce groupe de fanatiques du Moyen-Âge : ils n'étaient que des pions sur un grand échiquier où un sorcier et un magicien se disputaient partie après partie, depuis la nuit des temps.
Au fil des siècles, les soldats du mage blanc avaient aussi bien été des gladiateurs que des chevaliers ou des samouraïs. Mais ceux du mage noir étaient toujours des créatures surnaturelles qui n'hésitaient jamais à utiliser des tactiques déloyales pour faire avancer leur maître sur le plateau de jeu. Le sorcier gagnait presque tous les matchs, se délectant de voir tomber un à un les défenseurs du Bien. Heureusement, les règles du jeu, que respectaient plus ou moins les factions opposées, spécifiaient qu'une victoire du magicien obligeait son adversaire à attendre cent ans avant de le défier à nouveau. Toutefois, le vil personnage transgressait à son gré ces règles, qu'il jugeait stupides…
Terra et son ami astrophysicien avaient failli être tués lors de la dernière partie entre les deux immortels. La confiance que Christopher Dawson avait accordée aux membres de la Table ronde s'était également effritée lorsqu'il s'était aperçu qu'ils avaient fait un pacte avec la partie adverse. Pourtant, ils avaient longtemps représenté sa seule famille. Aussi, une fois que Terra eut remis sa couronne à sire Kay et sire Lancelot, le jeune savant avait quitté le Texas pour s'établir à Little Rock.
Dawson, qui portait toujours fièrement le nom de Galahad, avait tout de suite entrevu le potentiel de cette petite ville de Colombie-Britannique. Sa situation idéale à la campagne, loin des grandes villes, avait permis à Galahad d'opérer la transformation radicale de Little Rock en quelques mois seulement. Il avait déposé son plan d'action au conseil municipal, bien décidé à se battre pour relancer l’économie de la région. À sa grande satisfaction, ses idées avaient été très favorablement accueillies.
Le conseil avait tout d'abord accepté de changer le nom de Little Rock par celui de Nouvelle-Camelot. Tenace, Galahad avait ensuite harcelé tous les paliers de gouvernement afin d'obtenir les subventions nécessaires à la modification des devantures des magasins et des commerces. Le chevalier ne s'était pas arrêté là. Il avait redessiné le plan de la ville pour que les rues adoptent la configuration tortueuse des cités médiévales. Les habitants avaient accepté avec quelques réticences de voir leurs maisons, désormais recouvertes de pierres de taille, déplacées par d'énormes camions, puis collées les unes aux autres. Finalement, rassurés par la confiance qu'affichait Galahad, ils avaient participé à l'érection de la muraille qui entourait entièrement Nouvelle-Camelot et à la pose du macadam dans toutes les rues. Même les lampadaires électriques avaient été remplacés par des réverbères à gaz, allumés tous les soirs par des équipes de surveillance vêtues de tuniques et de tabards aux couleurs de la nouvelle municipalité, à savoir le vert, le noir et le blanc ou, comme les appelaient les experts en la matière, le sinople, le sable et l’argent.
Tous les ouvriers de Little Rock s'étaient recyclés dans les métiers du Moyen-Âge, si bien que le taux de chômage était presque tombé à zéro en à peine un an. Certains travaillaient le cuir, d'autres fabriquaient des vêtements, des armes anciennes et des tapisseries, ou bien façonnaient des bijoux exquis.
L'importante restructuration de la ville avait occupé Galahad à un point tel qu'il avait dû quitter son poste d'enseignant à l'école secondaire. En plus de rencontrer régulièrement des politiciens susceptibles de lui venir en aide dans la concrétisation de ses projets, le preux chevalier avait supervisé la construction de son propre château, à la frontière nord de la ville, à l'orée de l'immense forêt qui s'étendait jusqu'aux montagnes. La plus grande partie de ce territoire avait été déclarée zone protégée par le gouvernement de Colombie-Britannique, puisqu'elle abritait plusieurs oiseaux et animaux en voie de disparition. Galahad était donc assuré de ne jamais avoir de voisins. Sa forteresse se dressait au bout d'une longue allée qui partait de la cité. Elle renfermait un donjon, quatre tours reliées par une épaisse muraille, une cour intérieure et un vaste hall, au-dessus duquel se trouvaient les appartements privés de l’astrophysicien et de son épouse. L'oriflamme de Nouvelle-Camelot flottait fièrement sur un haut mât, affichant sur son blason noir et vert un ours blanc tenant deux longues épées en acier entre ses griffes.
Chaque été, Galahad organisait des tournois pour les amateurs de ce sport ancien. Le reste de l'année, il entraînait des chevaliers et leurs chevaux, qui provenaient aussi bien de la région que d'autres continents. Son épouse, Chance Skeoh, l'avait finalement persuadé d'accepter les femmes dans ces compétitions pourtant vigoureuses. Galahad s'était difficilement plié à cette requête de la part de celle qui partageait désormais sa vie, car il avait trop longtemps fait partie d'un ordre de chevalerie où les femmes étaient davantage des objets de vénération que des combattantes. Heureusement, son amour pour Chance avait petit à petit effacé de sa mémoire les préceptes de la Table ronde, ce qui lui avait permis d'en établir de nouveaux pour l’ordre de Nouvelle-Camelot.
Chance maniait habilement l’épée, mais sa peur des chevaux lui avait fait préférer les combats singuliers aux tournois, au grand soulagement de son mari, d'ailleurs. Toutefois, une jeune fille, chère au cœur du chevalier, lui causait beaucoup d'angoisse depuis qu'elle avait commencé sa formation à son château. Béthanie, fille d'Amy Dickinson et de Terra Wilder, avait hérité de l'amour de ce dernier pour le monde médiéval, tandis que son frère jumeau, Aymeric, partageait plutôt l'attrait de Terra pour la science.
Par mesure de prudence, Galahad ne permettait qu'aux femmes les plus douées de se mesurer aux hommes dans des tournois ou en combat singulier. À peine âgée de quinze ans, Béthanie figurait parmi ses championnes. Puisque Terra était son meilleur ami, le châtelain se sentait obligé de veiller sur elle, ce qui ne plaisait évidemment pas à l'adolescente.
Les jumeaux Wilder n'étaient pas identiques. Aymeric avait les yeux bleus et les cheveux blonds de sa mère. Pas très costaud, il était cependant doté d'une intelligence bien au-dessus de la moyenne. Il s'intéressait à l'abstrait plutôt qu'au concret, et l'informatique n'avait plus de secret pour lui. Sa sœur, plus robuste, avait les cheveux noirs et les yeux verts de Terra. Davantage portée sur les sports que sur les sciences, Béthanie s'était rapidement distinguée dans toutes les disciplines athlétiques de l'école, mais au lieu de rêver de participer un jour aux Jeux Olympiques, elle voulait plutôt devenir l'équivalent féminin du chevalier parfait.
Terra avait froncé les sourcils lorsque Béthanie lui avait parlé de ses aspirations. Il n'avait toutefois pas utilisé sa logique pour la faire changer d'avis, lui-même ne s'imposant aucune frontière et essayant tout au moins une fois. L'astrophysicien avait plutôt fourni à sa fille le meilleur équipement sur le marché et s'informait régulièrement de ses progrès auprès de Galahad.
Béthanie avait rapidement ébloui son maître d'armes, car elle apprenait rapidement et n'oubliait jamais un conseil. Elle s'entraînait plusieurs fois par jour, avant les classes et au retour de l'école, après ses devoirs et ses leçons, sans que ses résultats scolaires ne s'en ressentent. La situation était bien différente pour son frère jumeau, qui voyait ses notes chuter chaque fois que ses parents lui procuraient un nouveau jeu vidéo.
Amy accordait beaucoup de liberté à ses enfants. Elle voulait qu'ils soient heureux dans la vie. Les honneurs que convoitait sa fille n'avaient jamais été accordés à une femme, mais cela ne signifiait pas que l'exploit fût impossible. Aux côtés de Terra, Amy avait appris à croire à l'inconcevable. Elle savait aussi que l'inconstance de son fils était passagère et engendrée par l'adolescence. Elle le surveillait discrètement pour qu'il ne se rebiffe pas, prête à l'aider à trouver sa voie. Aymeric possédait la même capacité de concentration que Terra. Lorsqu'il se plongeait dans un livre de science ou dans un jeu électronique, plus rien n'existait autour de lui. Il en oubliait même de manger.
Terra et Amy n'avaient pas eu d'autres enfants, car ils en avaient plein les bras avec les jumeaux. L'avenir leur avait donné raison. Puisque Béthanie et Aymeric avaient des tempéraments diamétralement opposés et des besoins différents, leurs parents avaient dû se consacrer à tour de rôle à l'un, puis à l'autre. Même s'il avait repris sa forme physique, l'astrophysicien n'arrivait cependant plus à partager les activités sportives de sa fille comme il l'avait fait lorsqu'elle était petite. À dix ans, elle croisait déjà le fer avec les meilleurs escrimeurs du pays ! Son père se contentait donc maintenant de l'encourager.
Terra n'avait revu ni le sorcier ni le magicien après la terrible défaite du roi noir. Si tous les joueurs connaissaient les règles du jeu, aucun d'entre eux ne pouvait affirmer que le sinistre personnage respecterait le délai de cent ans imposé entre les matchs. L'astrophysicien, tout comme son ami Galahad, surveillait donc attentivement les habitants de la nouvelle cité, qui ne savaient rien du jeu.
Le Hollandais avait lui aussi transformé sa maison en châtelet, sans aucune ambition de l'agrandir un jour. Il se plaisait dans sa nouvelle vie et se contentait de peu. S'il refusait de porter son titre de roi, en revanche, il acceptait maintenant les dons qu'il avait reçus du ciel, à la suite de son accident de voiture au Texas. Ses mains, chargées d'énergie, guérissaient tous les maux. Mais comme chacune de ses interventions miraculeuses lui dérobait une partie de sa force vitale, il ne pouvait pas se permettre de soigner les malades tous les jours. D'un commun accord avec l'hôpital de Nouvelle-Camelot, il ne s'attaquait désormais plus qu'aux cas difficiles. Tant que les arbres accepteraient de lui redonner sa vigueur initiale, il continuerait à utiliser ses magnifiques facultés pour le bien de tous.
Terra enseignait toujours la philosophie à l'école secondaire de la région, aux jeunes comme aux adultes. Il participait aussi, secrètement, à certains travaux de recherche, mais uniquement à l'intention du Programme Spatial Canadien. Quelques années après sa mésaventure dans une base souterraine de Californie, le Hollandais avait reçu des lettres d'excuses de la part de divers paliers du gouvernement américain, mais cela n'avait pas suffi à le persuader de retourner vivre à Houston.
En fin de compte, Terra Wilder était un homme comblé. Il aimait son épouse et ses enfants, faisait sa part dans la communauté et ne cherchait jamais les ennuis. Même les sept terreurs, ces premiers étudiants auxquels il avait inculqué les principes du non-étiquetage, le rendaient très fier. Ils étaient tous dans la trentaine, maintenant, et ils menaient des vies rangées.
Comme tout le monde s'y attendait, Marco avait épousé Katy lors d'une belle cérémonie médiévale au château de sire Galahad. Rien n'était trop beau pour un frère d'armes, de l'avis de ce dernier. Quelques années plus tard étaient nées de cette union deux belles filles, qui ressemblaient à leur mère. Clara était maintenant âgée de dix ans et Morgane, de huit ans. Marco travaillait à l'hôpital en tant que physiothérapeute, et Katy avait ouvert sa propre boulangerie au cœur du village. Elle était donc au courant de tous les potins de Nouvelle-Camelot. Les Constantino vivaient dans l'une des maisons qu'on avait déménagées au centre de la cité, coincée entre deux autres maisons à deux étages. Ils avaient un tout petit jardin dans la cour qui leur suffisait, car ils n'avaient pas vraiment le temps de s'en occuper. Lorsqu'ils avaient besoin de grands espaces, ils n'avaient qu'à sortir des murailles et à pique-niquer à la campagne.
Clara et Morgane, lorsqu'elles avaient terminé leurs devoirs, aidaient souvent Katy à préparer la pâte et les pâtisseries du lendemain. Cette activité permettait à la mère d'en apprendre davantage sur les pensées profondes et les aspirations de ses filles. Quant à Marco, dans ses temps libres, il continuait à améliorer ses techniques d'escrime et aidait Galahad à former les chevaliers de demain. D'ailleurs, dès qu'elle aurait onze ans, Clara pourrait devenir écuyer, ce qui permettrait au père de passer lui aussi du temps de qualité avec elle.
De leur côté, même s'ils habitaient toujours Nouvelle-Camelot, Karen et Fred avaient opté pour un style de vie différent. Pas question pour eux d'avoir des enfants. Ils avaient fait le pacte de prendre soin l'un de l'autre et de ne laisser personne leur dire quoi faire. Ils avaient étudié la musique à Vancouver et avaient d'abord fondé un groupe rock, qui avait eu beaucoup de succès au Canada, aux États-Unis et même en Europe. Après une longue tournée mondiale, ils étaient revenus à leur point d'origine, épuisés mais contents d'avoir atteint leur but dans la vie. Il leur en fallait maintenant un nouveau. Un matin, Fred s'était réveillé avec la brillante idée de transformer leur groupe rock en groupe médiéval. Cette soudaine décision leur avait fait perdre leur batteur, leur bassiste et leur claviériste, qui vivaient en banlieue de Vancouver. Toutefois, elle leur avait aussi permis de découvrir de nouveaux talents à l'intérieur même des murailles de Nouvelle-Camelot.
Ayant déjà amassé une fortune considérable, le couple Mercer habitait une maison insonorisée, dans le jardin intérieur de laquelle il donnait régulièrement des concerts sur une vaste pelouse agrémentée de statues de chevaliers, de belles princesses, de licornes et de dragons. Ils se produisaient encore un peu partout dans le monde, mais uniquement lors d'événements en lien avec le Moyen-Âge, et ils passaient le plus clair de leur temps dans le studio d'enregistrement de leur maison, à adapter d'anciennes mélodies ou à en composer de nouvelles. Leur groupe, qui portait le nom d'ESTANDART, figurait parmi les meilleurs vendeurs de disques de musique médiévale.
Au grand étonnement du petit groupe des terreurs, Julie avait épousé Frank Green, le nouveau pasteur de Nouvelle-Camelot. La jeune femme avait étudié à Vancouver pour devenir infirmière d'unité de traumatologie. Elle aurait pu faire une belle carrière n'importe où dans le monde, mais elle avait décidé de revenir dans sa ville natale pour mettre ses connaissances au service de sa communauté. Entre-temps, toujours aussi croyant, Frank avait étudié la théologie et amassé des dons pour la construction d'une magnifique chapelle en plein cœur de la cité. Lorsque les deux anciens amis s'étaient finalement revus, Cupidon avait lancé ses fléchettes au bon endroit et ils avaient commencé à se fréquenter de plus en plus sérieusement.
Ils habitaient la petite maison attenante à l'église et n'avaient pas encore d'enfants, ce qui n'étonnait personne, puisque la plupart du temps, leurs horaires ne concordaient pas. Frank travaillait le jour et Julie, le soir. Ils se croisaient donc au déjeuner et au souper pour bavarder de leurs expériences respectives à l'église et à l'hôpital, et rêver du jour où ils pourraient enfin jouir d'une retraite bien méritée.
Chance, le septième membre du groupe d'adolescents qui avaient fait partie des premiers élèves de Terra, avait évidemment épousé Galahad dès qu'elle avait été majeure. Après l'obtention de son diplôme d'études secondaires, la jeune femme avait entrepris des études de piano qui lui avaient finalement assuré une belle renommée dans le monde de la musique classique. Elle avait enregistré des disques avec les meilleurs orchestres internationaux, mais n'avait joué en public que quelques fois à peine, et seulement au Canada. Timide à l'extrême, elle préférait sa vie de châtelaine à celle d'une virtuose du piano, mais tout le monde croyait que c'était son amour pour son beau chevalier qui l'empêchait de quitter Nouvelle-Camelot.
Un autre couple faisait jaser les habitants de la cité, car on les voyait déjà mariés et avec une ribambelle d'enfants. Il s'agissait d'Aymeric Wilder et de son amie Mélissa Penny. Terra écoutait les ragots d’une oreille distraite. Il savait mieux que quiconque que les deux adolescents n'étaient que des amis, élevés ensemble depuis leur naissance et partageant les mêmes goûts. Ils adoraient les jeux vidéo et s'y livraient une féroce compétition. Mélissa, la fille du docteur Penny, n'était pas une aguicheuse. Elle ne portait une robe que lors des grandes occasions, sous la menace de ses parents, et préférait se vêtir de jeans et de pulls un peu trop grands pour elle et qui ne montraient aucune de ses formes féminines. Cependant, elle n'avait que seize ans, alors tout n'était pas encore perdu.
Terra ne voyait nullement d'un mauvais œil une éventuelle union entre son garçon et la fille de son ami, mais il préférait qu'elle se fasse lorsqu'ils seraient adultes. En ce début de vacances d'été, les deux adolescents s'intéressaient encore aux divertissements électroniques et boudaient même les danses organisées par leurs camarades de classe.
Tout était donc parfait, dans le meilleur des mondes possibles…