Comme toutes les femmes du village, Frasquita avait suivi le combat à distance, de sa cuisine, s’appuyant sur les cris pour imaginer la scène. Elle avait fermé les yeux et son corps s’était ouvert au brouhaha des hommes.
Exclamations, grondement des murmures, encouragements, cris de joie avaient soudain disparu, soufflés par un lourd silence.
Sur son ventre tendu comme un tambour, un frôlement. Son duvet s’était hérissé.
Les autres avaient-elles senti cette caresse ?
Et puis un appel unique avait déchiré le calme absolu tombé sur le pays. Son prénom lancé dans les rues, frappant à toutes les portes, la cherchant à tâtons dans l’ombre glacée.
L’air froid avait vibré...
Alors elle avait compris, elle était montée chercher sa boîte à couture et les avait attendus, l’homme et le coq. Et pour la première fois, son aiguille s’était attaquée à de la chair.
Assise à côté du poêle, elle avait travaillé le coq inanimé comme une étoffe déchirée. Elle l’avait recousu au fil rouge, puis avait fait carne cortada avec prières et croix rituelles.
Une fois le coq sauvé, Angela, qui n’était pas intervenue et l’avait regardée faire, lui avait demandé : « Pourquoi ? »
Frasquita n’avait rien trouvé à répondre.
Pourquoi ?
Elle n’en savait rien.
Pour cette caresse peut-être...