25
Une fois que les femmes eurent goûté à une journée de repos sur la plage, Donald remit l'autocaravane en route. Il remonta sans se presser vers le nord et se retrouva finalement dans la région du mont Shasta, là où ils avaient failli perdre Terra à tout jamais plusieurs années auparavant. Après s'être rendu en camion jusqu'au barrage, le médecin avait alors traversé la région à cheval, en compagnie de Galahad et de Ben Keaton. Il se rappela le paysage de la Californie du nord, beaucoup plus sec que celui de la Colombie-Britannique. Il se rappela aussi les états d'âme du chevalier parfait. C'était dans cette contrée qu'ils s'étaient liés d'amitié.
Donald se perdit dans ses pensées. L'arrivée de Terra Wilder à Little Rock avait bouleversé la vie d'un si grand nombre de gens… Sans lui, les élèves de l'école secondaire seraient presque tous devenus des délinquants. Des centaines de personnes n'auraient jamais non plus recouvré la santé, car grâce à son don, le Hollandais les avait guéries. Enfin, Mélissa ne serait jamais devenue la belle jeune fille qu'elle était. Sans Terra Wilder, elle aurait été enterrée quelques jours après sa naissance…
Inattentif pendant un long moment, Donald ne découvrit le barrage dressé sur la route par les forces policières qu'une fois coincé dans la file d'automobiles qui faisaient l'objet de vérifications.
— Que se passe-t-il ? demanda Nicole en sentant ralentir le véhicule.
— C'est un contrôle policier.
— Le sorcier pourrait-il en être responsable ? se crispa Amy.
— C'est un lugubre personnage, mais il ne faudrait pas tout lui mettre sur le dos.
— Ce Medrawt est peut-être parmi les policiers, souligna Nicole.
— Si c'est le cas, alors nous saurons que c'est un piège.
— Une fois pris dedans, soupira Béthanie.
— Tu ne tiens sûrement pas ce sarcasme de ton père, toi, la taquina le médecin.
— Donald, comment peux-tu rester calme à un moment pareil ? lui reprocha Amy.
— Mais il ne s'est encore rien passé !
— Où sommes-nous ? demanda Mélissa.
— Ça m'apprendra à voyager avec un troupeau de femmes, ironisa Donald.
— Nous sommes tout près d'une réserve indienne, indiqua Nicole après avoir consulté la carte géographique ouverte sur la table devant elle.
Donald se souvint aussitôt du village où il s'était arrêté avec Galahad et Ben. Parce qu'il avait perdu la mémoire, Terra ne connaissait plus son propre nom. Il s'était trouvé à quelques pas d'eux sans le savoir.
— Pourrait-on la visiter ? s'égaya Mélissa.
— Ce n'est peut-être pas le bon moment, ma chérie, l'informa son père.
Donald suivit patiemment la longue file d'automobiles et de camions que les policiers fouillaient de fond en comble sans se presser. Lorsque ce fut son tour de se présenter devant eux, le médecin arrêta le moteur et baissa la vitre de sa portière.
— Que se passe-t-il ? se renseigna-t-il.
— Nous sommes à la recherche d'un jeune garçon, expliqua l'agent. Pourriez-vous descendre du véhicule, je vous prie ?
— Oui, bien sûr.
Amy et Nicole poussèrent leurs filles à l'extérieur.
— Vous pensez qu'il a été enlevé ? demanda Donald aux policiers.
— Nous n'en savons rien. Il a disparu de chez lui il y a deux jours.
C'est alors qu'Amy aperçut une femme qui marchait nerveusement derrière les voitures des policiers.
— Reste ici, ordonna-t-elle à Béthanie.
— Où vas-tu ?
— Je crois que cette femme là-bas est la mère du garçon. Je veux seulement aller lui dire quelques mots de réconfort, car je sais exactement ce qu'elle ressent. Lorsque vous pourrez circuler de nouveau, rejoignez-moi.
Elle se faufila à travers les représentants de l'ordre, puis entre les voitures. Elle s'approcha de l'inconnue et sut qu'elle avait visé juste. Un torrent de larmes coulait sur le visage de la pauvre femme. Amy se plaça sur sa route et attendit qu'elle revienne vers elle.
— Puis-je vous parler ?
Sa voix fit sursauter la mère éplorée.
— Qui êtes-vous ?
— Je suis une mère à la recherche de son adolescent, répondit Amy.
— Vous avez perdu votre fils, vous aussi ?
— Il a été enlevé alors que le reste de la famille était en vacances à Disneyland.
— Quel âge a-t-il ?
— Quinze ans.
— Jacob en a quatorze. Il s'est littéralement volatilisé dans sa chambre tandis qu'il jouait à son jeu vidéo préféré.
— Ne perdez surtout pas espoir. Nous devons croire qu'ils nous seront rendus. Je m'appelle Amy Wilder.
L'inconnue tressaillit en entendant ce nom de famille.
— Avez-vous besoin de vous asseoir ? s'inquiéta Amy.
— Comment s'appelle votre mari ?
— Terra Wilder.
Hélène Deux Lunes tourna aussitôt les talons et s'éloigna de sa rivale. Amy la poursuivit et la saisit par le bras, la forçant à s'arrêter.
— Je n'ai pas voulu vous offenser, assura la Canadienne.
— Ce n'est pas votre faute…
Amy l'emmena s'asseoir sur des chaises de patio que les policiers avaient placées derrière leurs voitures.
— Ce n'était pas la sienne non plus, ajouta tristement Hélène.
— Je ne comprends pas.
— Il semblerait que votre mari soit aussi le père de mon fils.
— Quoi ? s'étrangla Amy en pâlissant.
— Combien d'hommes portent ce nom, selon vous ? Il y a fort longtemps, un membre de ma tribu a repêché un étranger dans la rivière. Il s'était frappé la tête et souffrait d'amnésie.
Terra avait raconté cet épisode de sa vie à Amy, mais il avait apparemment oublié de lui mentionner quelques détails, dont la conception d'un enfant !
— Je m'appelle Hélène Deux Lunes. Je suis médecin au petit hôpital de la réserve. C'est moi qui l'ai soigné. Je m'étais jurée de ne jamais plus tomber amoureuse de qui que ce soit, mais il était si démuni, si seul et si séduisant. Quand il a recouvré la mémoire, je l'ai chassé de ma vie, ignorant que j'étais enceinte.
— Terra connaît-il l'existence de cet enfant ? parvint finalement à articuler Amy.
— Non. Il a d'abord fallu que je décide si je voulais garder ou non ce bébé. Vous allez peut-être me prendre pour une folle, mais c'est la voix de la Vierge, que j'ai entendue en rêve, qui m'a convaincue de le rendre à terme.
« Sarah Wilder », comprit Amy. Même les anciens élèves de Terra, qui l'avaient aperçue jadis, l'avait prise eux aussi pour cet important personnage biblique.
— J'ai attendu sa naissance avant de prendre une décision, poursuivit Hélène. Une fois sa mémoire retrouvée, Terra m'avait parlé de sa famille, alors je me suis résolue à élever Jacob toute seule. Je ne voulais pas causer à Terra plus d'ennuis qu'il n'en avait déjà. J'ai même donné mon nom au bébé. Jacob n'a commencé que tout dernièrement à poser des questions sur son père. Je lui ai dit le peu que je savais, mais pas où il habitait.
— Pourrait-il simplement être parti à la recherche de Terra ?
— Je ne sais plus quoi penser. Lorsque Jacob a disparu, le système d'alarme de la maison était armé. Mon fils n'aurait pas pu partir sans le déclencher, même en sortant par une fenêtre. Nous avons fouillé partout sans le trouver. La police est incapable de m'expliquer ce qui s'est passé.
« Terra ne lui a donc pas raconté que toute sa vie était une série d'événements étranges », songea Amy.
— Je vois dans vos yeux que vous me cachez quelque chose, remarqua Hélène.
— Peut-être bien… Cependant, je ne peux pas vous en faire part ici.
— Accepteriez-vous de m'en parler chez moi ?
— Je voyage avec ma fille et des amis.
— Ils sont aussi les bienvenus.
— Je vais aller les chercher.
Hélène s'empara des mains de celle qui avait eu le bonheur de passer sa vie auprès de Terra Wilder et les serra avec gratitude. « Je sais exactement ce qu'elle ressent », se chagrina intérieurement Amy.
— Tout ira très bien, Hélène. Faites-moi confiance.
Amy parvint à regagner l'autocaravane, après avoir expliqué à plusieurs agents de la paix le but de sa présence loin du véhicule. Nicole perçut aussitôt son désarroi.
— On dirait que tu as vu un fantôme, s'alarma-t-elle.
— Si ce n'était que cela… À son retour de Californie, il y a plus de quinze ans, Terra m'a raconté son étrange aventure, mais il a apparemment oublié quelques détails.
— Es-tu en train de nous dire que cette femme le connaît ? devina Donald.
— Elle est médecin et elle s'est occupée de lui après son évasion de la base militaire. Il a passé suffisamment de temps avec elle pour lui donner un fils.
— Quoi ? s'exclamèrent les adolescentes en même temps.
— Elle aimerait que nous nous arrêtions chez elle, ajouta Amy.
Donald fronça les sourcils. Était-il sage de rouvrir de vieilles blessures ?
— Pourquoi hésites-tu ? s'inquiéta Amy.
— Sans vouloir vous alarmer, ne trouvez-vous pas étrange que ce second fils de Terra ait été enlevé presque en même temps qu'Aymeric ?
— Tu crois que ce pourrait être un piège du sorcier ?
— C'est une possibilité que je dois prendre en considération si je veux vous protéger.
— Je suis d'accord avec toi, mais nous devons mettre cette femme au courant de ce qui se passe.
— Elle va nous prendre pour des fous, laissa alors tomber Béthanie. Avez-vous oublié que c'est pour avoir une vie normale que vous n'avez jamais parlé de ces événements à qui que ce soit ?
— Elle a raison, l'appuya Nicole. Nous devons être vigilants.
— Je demeure d'avis que cette mère a le droit de savoir ce qui est arrivé à son enfant, insista Amy.
— Sauf que nous n'en savons rien, lui rappela Donald.
— Son fils s'est volatilisé dans sa chambre tandis qu'il jouait sur son ordinateur.
— Comme Aymeric, fut forcée d'admettre Mélissa.
— Cette discussion pourrait durer des heures, alors voilà ce que nous allons faire, trancha le médecin. Nous irons chez cette femme et nous n'y resterons qu'une heure ou deux.
Donald conduisit donc le gros véhicule jusqu'à l'endroit où les attendait Hélène, au-delà des barricades. Celle-ci grimpa sans hésitation dans l'autocaravane. Le médecin l'étudia pendant quelques secondes. Elle ressemblait aux Amérindiens qu'il avait rencontrés jadis lorsqu'il était à la recherche de Terra dans cette région. Ses cheveux noirs étaient striés de mèches blanches et ses yeux sombres reflétaient une profonde sagesse. Donald comprit alors pourquoi son ami s'était épris d'elle. Malgré sa tristesse, il émanait d'elle une grande force.
— Hélène Deux Lunes, voici le docteur Donald Penny, son épouse Nicole et leur fille Mélissa, les présenta Amy.
Un sourire éclaira le visage de l'Amérindienne lorsque Béthanie s'approcha.
— Tu ressembles beaucoup trop à Terra pour ne pas être sa fille…
— Je m'appelle Béthanie et j'ai un frère qui s'appelle Aymeric.
Donald suivit les directives d'Hélène et gara l’autocaravane dans l'entrée de sa maison. Il laissa passer les femmes devant lui et fut le dernier à entrer dans le salon. L'Amérindienne alla tout de suite chercher la photo la plus récente de son fils parmi toutes celles qui trônaient sur le manteau de la cheminée.
— Voici Jacob, indiqua-t-elle en la remettant à Amy.
Il avait la même forme de visage que ses enfants. Ses cheveux étaient de jais, comme ceux de Béthanie, mais il avait les yeux noirs de sa mère alors que ceux des jumeaux étaient verts et bleus.
— Je vous en prie, asseyez-vous, les convia Hélène.
Ils prirent tous place sur les fauteuils. La décoration était moderne, à l'image de la maîtresse des lieux.
— Jacob aime-t-il l'informatique ? demanda Béthanie.
— Oui, depuis qu'il est tout petit. Cela ne l'a toutefois jamais empêché de croire aux esprits de la nature.
— Vous n'y croyez donc pas vous-même ? risqua Amy.
— J'ai quitté temporairement la réserve pour étudier la médecine à San Francisco. La science m'a en quelque sorte ouvert les yeux. N'allez surtout pas croire que je suis athée, loin de là. Je sais mieux que quiconque qu'il y a quelque part une intelligence invisible qui veille sur nous. Toutefois, en ce qui me concerne, c'est la même qui anime les arbres, les rivières et les étoiles, pas une panoplie d'esprits qu'il faut constamment apaiser. Jacob a subi l'influence de certaines personnes superstitieuses de la tribu, et puisqu'il est très impressionnable…
— Comme Aym, quoi, nota Béthanie.
— Hélène, ce que je vais vous révéler au sujet de l'enlèvement de Jacob va vous paraître insensé. Puisque j'ai également réagi de façon incrédule la première fois qu'on m'a parlé du jeu, je ne vous en voudrai pas de me prendre pour une folle. Je respecte vos convictions scientifiques, mais je ne peux pas taire ce que je sais.
— De quel jeu parlez-vous ?
— Depuis la nuit des temps, un magicien et un sorcier se disputent ce qui ressemble un peu à une partie d'échecs. Le but du jeu est d'éliminer les pions de l'autre, au sens littéral du terme.
Hélène fronça les sourcils, sceptique.
— Terra s'est fait piéger par l’ordre de chevalerie que le magicien avait choisie pour l'aider à vaincre son adversaire.
Aucun des membres de ce groupe ne voulait assumer le rôle de la pièce maîtresse, car c'est elle que le sorcier cherche surtout à abattre.
— Le roi, saisit l'Amérindienne.
— C'est exact.
— Nous pensons que le rapt d'Aymeric et de votre fils est relié au jeu.
— Si Jacob n'avait pas disparu dans des circonstances aussi mystérieuses, je ne porterais aucune attention à vos propos, mais je ne sais plus vers qui me tourner.
— Mon fils a disparu dans la chambre d'invités d'un de nos amis, aspiré par un tableau accroché au mur. Lorsqu'on m'en a informée, j'ai d'abord cru qu'on se moquait de moi. Terra, lui, a tout de suite compris que son vieil ennemi était de retour et il s'est empressé de rentrer chez nous. Que nous y croyions ou non, Hélène, il existe des créatures surprenantes dans notre univers. Certaines veillent sur nous, et d'autres nous utilisent à leurs fins.
— Êtes-vous en train de me dire que nous ne reverrons jamais nos enfants ? s'étrangla la femme médecin.
— Si vous connaissez Terra aussi bien que moi, vous savez déjà qu'il fera tout ce qu'il pourra pour les retrouver et châtier leur ravisseur.
— Même si ce dernier n'est pas de ce monde ?
— Il a de puissants alliés. Lorsque vous avez rencontré mon mari, il était au beau milieu de la partie précédente. Le sorcier a tout tenté pour se débarrasser de lui. Terra l'a déjoué sur tous les plans, permettant ainsi au magicien de l'emporter. Je sais qu'il le vaincra à nouveau.
— Cette histoire est complètement aberrante et pourtant, c'est la seule lueur d'espoir à laquelle je peux me raccrocher. Dites-moi ce que je dois faire pour revoir Jacob.
— Priez.
Hélène avait cessé d'espérer quoi que ce soit du ciel depuis la mort de son époux, mais elle garda cette pensée pour elle. Elle invita les Canadiens à partager le repas du soir avec elle et discuta longuement des progrès récents de la médecine avec Donald.
Tandis que les adultes bavardaient au salon et que Mélissa s'était finalement endormie sur le sofa, Béthanie sentit son sang de guerrière se remettre à bouillir dans ses veines. Il y avait peut-être des indices importants dans les affaires de Jacob qui lui permettraient de sauver son frère, alors elle s'esquiva et explora la maison. Tout comme la sienne, elle s'étendait sur un seul étage et comptait trois chambres à coucher. Béthanie n'eut aucun mal à localiser celle qu'elle cherchait. Elle s'y aventura et pivota sur elle-même en examinant attentivement les lieux.
La décoration se composait d'un curieux mélange de talismans amérindiens et d'affiches illustrant la conquête de l'espace. Au-dessus du lit pendait un mobile constitué de petits vaisseaux spatiaux tirés de plusieurs émissions de télévision populaires. Sur les tablettes de la bibliothèque s'alignaient des ouvrages scientifiques variés. Béthanie en reconnut plusieurs titres, car son frère les possédait lui aussi. « S'il me ressemble physiquement, Jacob a plutôt les mêmes goûts qu'Aymeric », se dit-elle. L'édredon sur le lit représentait une icône d'un film culte de science-fiction, exactement comme celui de son frère. « J'espère qu'ils auront l'occasion de se rencontrer un jour », espéra l'adolescente.
Elle entendit soudain un grondement sourd. Hélène possédait-elle un chien ? Certains animaux n'aimaient pas la présence d'étrangers et se réfugiaient dans les pièces les plus éloignées lorsqu'il en arrivait dans leur maison. Béthanie s'accroupit donc pour regarder sous le lit. Il n'y avait rien, pas même un grain de poussière. Elle fut alors plaquée sur le sol par une bête beaucoup trop puissante pour être domestique.
La jeune fille se débattit et roula sur le côté, se retrouvant face à face avec un énorme loup tout noir qui montrait ses crocs. Ce dernier contracta ses muscles pour bondir à nouveau. Béthanie cessa de réfléchir. Comme Galahad le lui avait si souvent conseillé, elle ne perdit pas son sang-froid. La peur paralysait les réflexes d'un chevalier. Au moment où le prédateur s'élança, elle glissa sous le lit, se releva rapidement de l'autre côté et bondit vers la porte qu'elle referma brutalement sur le museau de l'animal.
Ce claquement sec attira tout de suite l'attention de Donald et Hélène, qui déboulèrent en même temps dans le corridor des chambres. Les pieds arc-boutés contre le chambranle d'une porte, Béthanie tirait de toutes ses forces sur la poignée.
— C'est la chambre de Jacob ! s'écria Hélène, effrayée.
— Béthanie, que se passe-t-il ? s'alarma Donald.
— Il y a un loup là-dedans !
Hélène fit prestement demi-tour pour aller chercher une arme.
— Il n'était pas là quand je suis entrée dans la chambre, affirma bravement l'adolescente. Et il n'est pas entré par la fenêtre puisqu'elle est fermée.
— Il circulait donc déjà dans la maison.
La femme médecin revint avec en main la carabine de son défunt mari.
— Béthanie, retourne dans le salon, exigea-t-elle.
— Mais j'ai appris à…
Le regard autoritaire de Donald mit fin à ses protestations. Béthanie lâcha la poignée et tourna les talons. « Personne ne me fait jamais confiance », bougonna-t-elle intérieurement en s'éloignant.
Hélène arma le fusil et fit signe à Donald qu'elle était prête à tout. Celui-ci prit une profonde inspiration et entrouvrit la porte. D'un coup de pied, l'Amérindienne la poussa vers l'intérieur. Les deux médecins virent alors un énorme loup s'enfoncer dans l'écran de l'ordinateur, sur la table de travail. Hélène poussa un cri de rage et laissa partir un premier coup de feu. Le choc la projeta contre la poitrine de son invité.
— Tout doux ! s'écria Donald, impressionné par la détermination de cette femme, pourtant aussi menue que sa fille.
Il lui enleva l'arme des mains et la déposa sur le lit, puis récupéra l'écran tombé derrière le meuble.
— Nous sommes assurés qu'il ne repassera plus par là, dit-il en laissant retomber les restes électroniques.
— Je viens de ruiner toutes nos chances de retrouver Jacob…
— À moins que vous ne possédiez la faculté de vous transformer en code binaire, vous allez maintenant devoir faire confiance à Terra.
Donald entoura les épaules de la pauvre femme qui tremblait de tous ses membres et la ramena doucement vers le salon, où Nicole et Amy achèveraient de la réconforter.