Les coups de marteau et les ahanements des hommes ébréchaient le silence de l’aube.
Allongé sur la planche qui lui servait de couchette, Élan Gris peinait à reconstituer les événements de la veille ; ils s’étaient enchaînés à une telle vitesse qu’il avait eu l’impression d’être un brin d’herbe happé par un violent tourbillon. Il se demandait où était Nadia. Il ne l’avait pas revue depuis que les hommes conduits par Jim s’étaient introduits dans sa chambre et jetés sur lui. Il n’avait pas eu le temps de se saisir de son fusil, ni même de se défendre avec ses poings. Il s’était rendu compte, un peu tard, de son imprudence. Il s’était profondément endormi alors que son animal guide avait grondé au plus profond de lui, alors qu’il s’était promis de rester vigilant. Il s’était écarté du chemin lumineux de sa vision et les monstres étaient surgis des ténèbres pour s’emparer de lui.
Ils lui avaient lié les mains derrière le dos et l’avaient conduit dans une petite maison voisine qui servait de cellule.
« Elle est pas souvent occupée, avait précisé Jim. On y met seulement les gars qui ont un peu bu pour qu’ils dessaoulent avant de rentrer chez eux. »
Il y avait passé le reste de la nuit, vêtu de ses seuls pantalon et tunique. La pièce n’étant pas chauffée, il s’était recroquevillé sur lui-même pour tenter d’échapper au froid. Au petit matin, un homme lui avait tendu une couverture à travers les barreaux.
« S’agit pas que tu crèves avant ton procès. »
Quel procès ?
Les Blancs n’avaient que ce mot à la bouche, ils intentaient des procès pour un oui pour un non. Les fermiers voisins de la réserve avaient même assigné le peuple en justice parce que, selon eux, les clôtures de la réserve avaient été érigées sur leurs terres. Le juge leur avait donné raison, et les autorités du royaume du Nord avaient été contraintes de démonter et remonter les clôtures en diminuant la surface déjà étriquée de la réserve.
On était venu le chercher au milieu de la journée. On lui avait redonné son manteau et ses bottes avant de l’emmener, toujours attaché, dans un bâtiment voisin de l’église, qui servait, à en croire les divers panneaux, de mairie, de salle des fêtes, de tribunal et d’école. On l’avait introduit dans une salle où avaient pris place, sur des travées, des dizaines de spectateurs. Au fond, sur l’estrade, trônait Jim, vêtu d’une robe noire de juge et, à ses côtés, une dizaine d’hommes portant veste et cravate. Élan Gris n’avait pas vu les yeux verts de Nadia ni ceux, plus sombres, de Jessica Telfer parmi les dizaines de regards braqués sur lui.
« V’là l’accusé, m’sieur le juge », avait dit l’un des hommes de l’escorte.
Jim avait donné un coup de maillet sur le bois de son pupitre pour interrompre les murmures qui volaient de travée en travée.
« Amenez-le dans le box. »
On avait installé Élan Gris dans un espace à demi cloisonné à gauche de l’estrade et placé de chaque côté de lui deux hommes armés de pistolets.
« Georges, tu seras son avocat, avait déclaré Jim en désignant un homme d’une cinquantaine d’années assis au premier rang.
— Moi ? Mais pourquoi ?
— Tu parles bien, tu as de l’instruction, tu es le mieux placé pour assurer sa défense. Et puis tu ne vas pas contester une décision du tribunal ?
— Jim, ne m’oblige pas à défendre un Rouge !
— Je n’ai pas dit que tu devais le défendre, mais il faut qu’il ait un avocat, c’est la loi.
— Quelle loi ?
— La vraie, la nôtre, avant que les pantins d’Espagne ne s’emparent de ce pays. »
Le dénommé Georges avait lissé ses cheveux du plat de la main avant de se lever et de rejoindre l’accusé dans le box.
Élan Gris se demandait encore s’il avait bien compris le chef d’accusation. On lui reprochait d’avoir assassiné Mary-Ann et Steven, les deux enfants de Jim et Jessica Telfer une vingtaine d’années plus tôt. Comment quelqu’un qui n’avait pas encore atteint ses seize ans pouvait avoir commis un meurtre vingt ans auparavant ? Il n’avait pas d’instruction, mais, comme tous ceux de son peuple, il savait compter. Jim, qui faisait également office de procureur, le désignait quand il parlait du Rouge qui avait découpé Mary-Ann et Steven en petits morceaux comme de vulgaires morceaux de bœuf. Plusieurs femmes pleuraient dans l’assistance. Élan Gris avait compris, au regard mauvais que lui jetait le dénommé Georges, qu’il n’avait rien à attendre de son avocat. À plusieurs reprises, il s’était cru prisonnier d’un cauchemar et il avait espéré se réveiller dans la chambre de la maison de ses hôtes.
« Le Seigneur a voulu qu’on capture enfin le Rouge qui s’était enfui après avoir perpétré son abominable crime. Il vient maintenant rendre compte de ses actes devant la justice des hommes et devant celle de Dieu. »
Le Rouge… Voilà pourquoi Jim avait obstinément refusé de l’appeler par son nom. Pour lui, Élan Gris n’était qu’un Rouge et, en tant que Rouge, il paierait pour le meurtre de ses enfants commis par un autre Rouge vingt ans plus tôt.
« À mort le Rouge ! » avait hurlé une femme de l’assistance.
Jim avait de nouveau donné quelques cous de maillet sur le bois du pupitre.
« Silence, c’est un tribunal ici, pas un champ de foire. »
Il fallait à Jim le vernis de la légalité pour exorciser sa douleur, pour exercer une vengeance qu’il ruminait depuis vingt ans. Les Indiens ne sortaient jamais de leurs réserves, aussi, quand l’un d’eux s’était présenté au village, il avait bondi sur l’occasion : il tenait enfin son coupable, il allait enfin pouvoir juger l’assassin de ses enfants, ou un autre Rouge, ce qui revenait au même. Les habitants de Blackstone, tout en sachant pertinemment que le garçon assis dans le box ne pouvait pas avoir commis le crime dont on l’accusait, approuvaient l’initiative de leur juge, comme pressés eux aussi d’en finir avec une histoire qui plombait depuis vingt ans l’atmosphère de leur village. Une fois que l’Indien se balancerait au bout d’une corde, les fantômes des deux enfants martyrs cesseraient de hanter leurs esprits, et, du moins le croyaient-ils, ils n’éprouveraient aucun remords d’avoir immolé un innocent rouge.
Voici comment Élan Gris s’était retrouvé condamné à mort à l’issue d’un simulacre de procès. Sommé par le juge de plaider, son avocat n’avait marmonné qu’une phrase :
« Que justice soit rendue. »
Les jurés avaient prononcé la sentence à l’unanimité sans même se retirer pour délibérer. La mort par pendaison. Jim avait annoncé que la peine serait exécutée le lendemain sur la place de Blackstone, puis, après avoir donné trois coups de maillet, avait déclaré que la séance était close et que chacun devait rentrer chez soi.
Ils avaient de nouveau enfermé Élan Gris dans la cellule. Cette fois, ils lui avaient laissé ses vêtements et la couverture.
« S’rait trop dommage que tu sois mort avant ta pendaison, avait ricané un homme. On n’a pas si souvent l’occasion de s’amuser, à Blackstone ! »
Ils avaient aussitôt entamé la construction de la potence. Les coups de marteau et les crissements des scies avaient résonné tard dans la nuit. Ils avaient repris le travail à l’aube. L’heure de la pendaison était fixée à dix heures.
La faim, la fatigue et le froid avaient émoussé la vigilance d’Élan Gris. Un guerrier aurait prêté attention aux avertissements de son animal guide et n’aurait pas dormi dans ce village, dans cette maison, ou alors d’un seul œil. Pourquoi Nadia n’était-elle pas intervenue ? Était-elle au courant de cette parodie de procès ? Autant de questions qui ne trouveraient probablement jamais de réponse. Il entrevoyait d’autres silhouettes dans son esprit, des gens qui venaient à sa rencontre sur le chemin de sa vision. Il ne les rejoindrait jamais à cause de sa négligence. Pourtant, il en était conscient, leur rencontre revêtait la plus grande importance, pas seulement pour eux et pour lui, mais pour l’ensemble de l’humanité.
Il se leva et, entre les barreaux de la lucarne de sa cellule, jeta un coup d’œil sur la place enneigée. La potence se dressait à quelques pas de l’église. Trois hommes coiffés de bonnets et vêtus de canadiennes fourrées s’occupaient des finitions. La corde n’avait pas encore été placée sur la poulie. Ils craignaient sans doute qu’elle ne gèle et ne devienne trop rigide. Des stries roses et dorées traversaient le ciel et enflammaient les nuages épars. Jamais il n’avait à ce point admiré la lumière de l’aube. Jamais il n’avait ressenti avec une telle intensité la fraîcheur de l’air qui s’infiltrait dans ses narines et dans sa gorge. Jamais il n’avait éprouvé une faim et une soif aussi délicieuses ; elles lui montraient qu’il était en vie et que la vie était un présent somptueux de Wakan Tanka. Il regrettait seulement de partir sans que ne lui soit offerte une dernière possibilité de combattre. La mort par pendaison, une mort misérable, une mort de Blanc, n’avait aucune valeur. Comment l’accueilleraient les guerriers de l’autre côté ? Avec mépris ? Avec compassion ? Il regrettait aussi d’être séparé de Nadia : il aurait aimé marcher plus longtemps à ses côtés. Il se sentait poussé vers elle comme ces feuilles emportées par les courants des ruisseaux au printemps. Il partirait avant son père Ours Brun et sa mère Petite Louve, mais le peuple tout entier s’effacerait bientôt : il n’y avait plus de place sur cette terre pour les Rouges.
Deux hommes vinrent le chercher au moment où la cloche de l’église sonnait les dix coups. Une foule nombreuse s’était assemblée sur la place devant la potence. Élan Gris observa l’assistance : il remarqua, parmi les spectateurs, la soutane d’un prêtre. Il ne repéra pas les cheveux couleur d’herbe séchée de Nadia. Son cœur s’en désola. Il aurait aimé croiser une dernière fois son regard avant de mourir. Jim, vêtu de sa robe noire de juge, se tenait au pied de l’escalier qui menait à la potence. Il garda ses yeux gris plongés dans ceux du condamné comme pour lui signifier qu’il ne regrettait rien, qu’il gardait la conscience tranquille. Élan Gris éprouva pour lui de la compassion : la vengeance ne le délivrerait qu’un temps de sa souffrance. Le chagrin et la colère, comme des fauves tapis dans l’ombre, reviendraient bientôt le dévorer. Tonnerre Grondant disait toujours qu’il n’y a qu’une façon de se réconcilier avec la vie : accepter la mort, la sienne et celle des autres.
« Jim Telfer ! Tu vas immédiatement libérer ce garçon ! »
La voix haut perchée avait fendu le silence avec la puissance d’une lame. Les têtes se tournèrent à l’unisson vers l’endroit d’où elle avait surgi. Suivie de Nadia, Jessica Telfer s’avança sur la place du village, les traits tirés, les yeux rougis.
« Ce qui se passe là ne te regarde pas, lança Jim.
— Comment ça, ça ne me regarde pas ? Ce sont aussi mes enfants qui sont morts il y a vingt ans. Tu sais très bien qu’Élan Gris n’a pas pu les tuer puisqu’il n’était même pas né au moment des faits ! Tu ne répareras pas une monstruosité par une injustice, Jim Telfer !
— Le tribunal a tranché et…
— Quel tribunal ? »
La foule s’écarta pour laisser passer Jessica. Le sourire que Nadia lui adressa enveloppa de chaleur le cœur d’Élan Gris.
« Ce tribunal n’a rien de légal ! Tu as seulement entraîné les autres dans ton délire, Jim !
— Tu étais pourtant d’accord avec moi, il me semble. »
Jessica s’avança vers son mari.
« J’ai réfléchi cette nuit. Rien ne nous rendra nos enfants. Et surtout pas la mort d’un innocent. De même, Nadia ne remplacera jamais notre fille. La meilleure chose que tu aies à faire, Jim Telfer, c’est de délier ce garçon et de les laisser poursuivre leur chemin. Si tu as vraiment des sentiments chrétiens, c’est le moment de les montrer.
— Il a été déclaré coupable et on a monté la potence, protesta Jim d’une voix hésitante.
— Ce n’est pas lui qui a tué nos enfants, on n’est même pas sûr que ce soit un Rouge.
— D’après les témoignages…
— Qui les a fournis, ces témoignages ? De pauvres types qui avaient trop forcé sur le bourbon. Écoute-moi, Jim, écoute-moi bien, parce que je ne me répéterai pas : si tu délivres pas ce garçon dans l’immédiat, tu ne me reverras plus jamais. »
Jim tritura nerveusement la collerette blanche de sa robe.
« Tu as changé, Jessica.
— C’est nous qui avons changé, nous tous, répliqua-t-elle. Nous avions un dessein jadis : instaurer un État libre à Blackstone. Et vois ce que nous sommes devenus : des tyrans pires que les pantins d’Espagne. Nos enfants sont morts il y a vingt ans, et nos rêves sont morts avec eux. Il serait grand temps de revenir à la vie. Alors rends ce garçon à la vie, Jim Telfer, et essayons de ressusciter nos rêves.
— Ce n’est qu’un Rouge, argumenta faiblement Jim.
— Un être humain, selon les commandements de Dieu. Comme toi, comme moi. » Jessica se tourna vers l’homme en soutane noire. « Est-ce que je ne dis pas la vérité, mon père ? »
Le prêtre consulta Jim du regard avant d’acquiescer d’un imperceptible mouvement de tête, de tourner les talons et de se réfugier dans l’église. Les autres villageois se dispersèrent à leur tour sans dire un mot.
« Qu’est-ce qu’on fait, Jim ? demanda l’un des hommes qui avaient escorté Élan Gris.
— Détachez-le et démontez-moi cette foutue potence », répondit Jim sans relever la tête.
Le menuisier du village, qui s’en allait livrer des meubles dans la région d’Albuquerque, proposa à Élan Gris et Nadia de les déposer dans le sud du royaume. Il s’appelait Brett et possédait un camion capable d’affronter tous les terrains et tous les temps, y compris les blizzards les plus sévères. Avant leur départ, Jessica remit à Nadia un sac rempli de provisions et rendit son fusil et ses cartouches à Élan Gris.
Jim ne vint pas les saluer.
« Comme chaque fois qu’il doit réfléchir, il enfile sa canadienne et ses raquettes, et il disparaît toute la journée. Mais ne nous inquiétez pas pour lui, il s’en remettra et reviendra. »
Ils grimpèrent à l’arrière du camion entre les meubles soigneusement arrimés et protégés par des couvertures.
« Comprenez, vaut mieux que vous soyez derrière si on croise des gardes royaux, expliqua Brett. Si jamais il y a un contrôle, débrouillez-vous pour rester planqués dans le fond. »
Ils partirent au début de l’après-midi. Le soleil brillait de tous ses feux et rendait la température agréable. Brett s’engagea sur les routes escarpées qui longeaient les montagnes Rocheuses. Élan Gris se sentait revenu sur le chemin lumineux de sa vision. Les monstres étaient retournés dans les ténèbres. Assis sur les meubles au côté de Nadia, il collait de temps à autre son œil à l’un des interstices de la bâche et observait les environs. Il ne distinguait que les pentes verglacées et les sapins ployant sous le poids de la neige. La vie avait maintenant une saveur inhabituelle, merveilleuse. Chaque scène, chaque objet qu’il contemplait lui paraissait imprégné de la puissance du Grand Esprit – y compris le camion de Brett et son moteur bruyant. Quant à Nadia, elle était la plus belle personne qu’il lui avait été donné de côtoyer.
« Je ne savais pas, pour le procès. » Elle avait parlé d’une voix forte pour dominer le grondement du moteur. « Ils m’ont raconté que tu t’étais enfui au milieu de la nuit.
— Tu les as crus ? »
Elle hocha la tête après une hésitation.
« Je… j’ai pensé que tu étais un Rouge et que tu n’avais rien à faire de moi, rien à faire d’une femme blanche.
— Je t’avais pourtant promis de ne jamais t’abandonner. Tu penses sans doute que les promesses des Rouges n’ont pas plus de valeur que celles des Blancs. »
Elle le fixa d’un air dépité.
« Je suis désolée, j’ai perdu confiance.
— Comment as-tu su, alors ?
— Jessica n’arrêtait pas de pleurer. Je lui ai demandé si c’était à cause de ses enfants. Elle m’a expliqué ce qui s’était passé vingt ans plus tôt. Leur certitude que l’assassin était un Indien. Je me suis alors douté qu’elle ne m’avait pas dit la vérité te concernant. Je l’ai interrogée, elle a refusé de me répondre. Son mari est ensuite rentré et elle a gardé le silence. Et puis, ce matin, peu avant dix heures, elle s’est brusquement levée, elle a passé son manteau, ses gants, et m’a dit de la suivre si je tenais à toi. Elle m’a tout avoué pendant qu’on marchait vers la place. Elle répétait sans cesse : je ne te laisserai pas faire, Jim Telfer. La suite, tu la connais aussi bien que moi. »
Ils s’arrêtèrent à la tombée de la nuit à l’entrée d’une petite ville du nom de Dolce. Le visage tanné de Brett s’immisça dans l’entrebâillement de la bâche.
« Il fait maintenant trop noir pour que j’puisse rouler. Je vais prendre une chambre dans un motel proche. Comme vous avez de quoi manger et boire, vaudrait mieux que vous ne bougiez pas du camion. Si vous êtes quand même obligés de sortir pour… enfin, vous savez, vos besoins, tâchez de le faire discrètement. Faut pas oublier qu’les gens d’ici ont pas l’habitude de voir des Rouges en dehors de leurs réserves. Y a des couvertures en trop au fond du camion. Ça vous permettra de supporter le froid. »
Quand le camion du menuisier se fut garé devant la chambre du motel, Élan Gris et Nadia s’installèrent le plus confortablement possible dans le camion. Ils poussèrent quelques meubles pour s’aménager un espace et confectionnèrent un matelas de fortune avec plusieurs couvertures repliées. Ils mangèrent un morceau de pain, de la viande séchée, burent quelques gorgées d’eau au goulot d’une gourde avant de s’allonger côte à côte et de tirer d’autres couvertures sur eux.
Des grondements de moteur et des éclats de rires lointains traversaient de temps à autre la nuit paisible. Nadia ne dormait pas, tournant et se retournant sur leur couche de fortune. L’ombre chaude de son corps empêchait Élan Gris de trouver le sommeil.
Alors que ses paupières s’alourdissaient enfin, elle dit, d’une voix timide qui résonna dans le camion avec la puissance d’un coup de tonnerre :
« J’ai froid, tu ne veux pas me réchauffer, Élan Gris ? »