CHAPITRE 2

Avocat de son état, Bob Packard était gros et avait tendance à se laisser aller. Sa ceinture, qu’il s’entêtait à serrer d’un cran de trop, lui sciait la taille. La graisse lui alourdissait les joues et formait plusieurs plis sous son menton.

Packard ne se sentait pas bien. Ses relevés bancaires et ses livres de comptes étaient étalés devant lui sur son bureau. Il venait de refaire tous les totaux, et le résultat était le même. D’un geste machinal, il passa la main sur ses lèvres sèches. Il croyait pourtant la situation moins catastrophique. Le volume de ses honoraires avait augmenté, les clients payaient normalement. Où l’argent était-il passé ? Les frais généraux de son cabinet restaient stables, tout comme ses dépenses domestiques. Mais, bien sûr, il y avait la cocaïne. De ce côté-là, la dépense semblait s’être considérablement accrue depuis quelque temps.

Packard prit une profonde inspiration et essaya de se calmer. Il fit rouler sa tête et secoua plusieurs fois ses épaules pour détendre les muscles. Si le problème, c’était la poudre, il n’avait qu’à arrêter la poudre. Aussi simple que ça. La cocaïne n’était pas une nécessité. Il pouvait en prendre comme il pouvait s’en passer, et il s’en passerait donc à l’avenir. Dès que sa provision serait épuisée.

Son problème résolu, Packard se sentit mieux. Repoussant les livres de comptes, il se plongea dans l’étude d’une affaire pour laquelle il devait présenter une motion de renvoi dans les quarante-huit heures. Il était vital que cette démarche aboutisse. Si son client passait en jugement, il était fichu. Et pour emporter la décision, il fallait une motion brillante, imparable, qui ne laissât rien au hasard – un modèle du genre.

Packard commença à lire, mais il avait du mal à se concentrer. Il pensait à ses problèmes d’argent, et à l’autre problème. Son fournisseur. Celui qui s’était fait coffrer deux jours plus tôt, alors que Packard devait justement récupérer un petit quelque chose pour reconstituer le stock qu’il voyait diminuer de jour en jour.

Puisqu’il allait arrêter, bien sûr, il n’y avait plus de problème. Mais tout de même, il détestait l’idée de ne pas pouvoir se procurer de coke au cas où il en aurait besoin. Rien qu’à y penser, il se sentait fébrile, alors qu’il lui aurait fallu du calme et de la concentration pour se mettre à cette motion.

Il songea au sac à fermeture Eclair qui se trouvait dans le tiroir de son bureau. Avec une petite ligne, il pourrait expédier à toute allure la recherche qu’il lui fallait faire avant d’attaquer cette motion, puis il la rédigerait en un tournemain… Et ce serait toujours un peu de cocaïne dont il n’aurait plus à s’inquiéter. Puisqu’il arrêtait, après tout, la première chose à faire était de se débarrasser du stock !

Il en était là de son raisonnement, et s’apprêtait à passer à l’acte, quand la réceptionniste l’appela sur l’interphone.

—  Mr. Packard, il y a ici un Mr. Deems qui demande à vous voir.

Packard fut pris d’un besoin urgent d’aller aux toilettes.

—  Mr. Packard ? appela l’hôtesse.

—  Euh… oui, Shannon. Je viens.

Bob Packard ne s’était jamais senti à l’aise en présence de Charlie Deems, même quand ils étaient séparés par la glace antiballes à travers laquelle ils avaient dû communiquer pendant le séjour de l’ancien trafiquant de drogue au quartier des condamnés à mort. Les faits qui avaient valu à Deems sa condamnation avaient de quoi impressionner les âmes les moins sensibles. Un certain Harold Shoe essayait alors de s’implanter sur le territoire de Deems. Deux gamins avaient retrouvé dans une décharge son cadavre affreusement mutilé. D’après les conclusions du médecin légiste, Shoe avait mis très longtemps à passer de vie à trépas. À la vue des photos dans le rapport d’autopsie, Packard avait perdu l’appétit pour le reste de la journée.

Le hasard voulut que Larry Hollins, un syndicaliste de vingt-huit ans qui travaillait en équipe de nuit, passe devant la décharge au moment où Deems y abandonnait son macabre fardeau. Hollins pensa aussitôt qu’il s’agissait d’un corps, puis se dit qu’il avait été victime de son imagination et n’y songea plus jusqu’au jour où il tomba sur un article de journal relatant la découverte du cadavre de Shoe.

Hollins ne reconnut pas Deems de façon formelle, mais se déclara certain de l’identifier le jour où on le lui présenterait dans un groupe de suspects. Une fuite s’étant produite, le nom de Hollins parut dans la presse, et Deems disparut de la circulation pendant plusieurs jours. Un matin, Hollins décida d’emmener sa fille de neuf ans à l’école afin de s’y entretenir avec son instituteur. Une charge explosive fixée sous la voiture les tua tous les deux.

Packard jeta un regard chargé de convoitise au dernier tiroir de son bureau, et se dit qu’il avait intérêt à affronter Deems avec toute sa lucidité. Charlie, d’ailleurs, devait être de bonne humeur. Packard ne venait-il pas de gagner son affaire en appel ? Il venait sans doute lui témoigner sa reconnaissance.

Quand Packard arriva dans le hall de la réception, Deems était plongé dans Newsweek.

—  Charlie ! lança Packard d’un ton chaleureux, en lui tendant la main. Quel plaisir de te voir !

Charlie Deems leva les yeux. C’était un homme de taille moyenne, aux épaules larges et au torse puissant. Plutôt joli garçon, avec ces cheveux bruns et bouclés il rappelait à Packard vaguement Warren Beatty. Le charme principal de Deems résidait dans son sourire, un rien gauche et qui vous mettait tout de suite en confiance. À moins, bien entendu, qu’on ait lu le rapport psychiatrique qui figurait dans le dossier criminel de Charlie Deems.

—  Tu as l’air en forme, Bob, déclara Deems avec entrain, comme ils s’asseyaient dans le bureau de l’avocat.

—  Merci, Charlie. J’en dirai autant de toi.

—  Ça m’étonne pas. Fallait bien que je m’entretienne et que je fasse passer le temps, pendant que j’étais là-bas. T’as pas idée du nombre de pompes et autres exercices qu’on peut faire quand on est enfermé vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Deems portait une chemise marron à manches courtes. Il gonfla le biceps de son bras droit en clignant de l’œil.

—  En effet, je vois, dit Packard d’un ton approbateur. Quoi de neuf ?

—  Pas grand-chose. Je suis simplement passé pour te remercier.

Packard haussa les épaules, modeste.

—  J’étais payé pour ça.

—  Tu t’es bien débrouillé. Je suis sûr que cette connasse de Griffen l’a en travers de la gorge, continua Deems en riant. Tu l’as revue, depuis le jugement ?

—  Une fois, oui, au tribunal. Mais je n’ai pas parlé de cette affaire. À quoi bon pavoiser…

—  Ah, Bob, t’es trop bon, vraiment ! Moi, j’aurais bien aimé la voir en face, parce que je sais que cette affaire lui tenait vraiment à cœur. Elle voulait ma peau. Elle aura rien du tout.

—  Oh, je ne pense pas qu’elle y tenait spécialement, Charlie.

—  Ah, bon ?

Il y avait quelque chose d’enfantin dans la curiosité exprimée par Deems.

—  Non, franchement, je ne le pense pas. Je crois qu’elle a fait son boulot, c’est tout. Il s’est trouvé que j’ai mieux fait le mien.

—  Ouais. T’as peut-être raison, mais c’est pas comme ça que je vois les choses. J’ai bien réfléchi à tout ça, pendant que j’étais au trou. J’avais tout mon temps pour penser à elle. Je suis sûr que cette salope m’en voulait, à moi personnellement, Bob.

Il y avait, dans le regard de Deems, une lueur qui inquiéta Packard.

—  Laisse tomber, Charlie. Tu vas avoir les flics à tes basques vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Tu ne peux pas prendre le moindre risque.

—  Ah, sûr. Pour ça, je suis d’accord. (Deems avait pris un ton raisonnable.) Il passera de l’eau sous les ponts. Non, Bob, je veux reprendre une vie normale. Ce qui m’amène à l’autre raison de ma visite.

—  C’est quoi ? demanda Packard, sur ses gardes.

—  Je voudrais te demander un petit service.

—  Lequel ?

—  Tu vois, j’ai l’impression que t’as pas eu trop de mal à gagner en appel dans mon affaire. On peut même pas me faire repasser en jugement – il a fallu que le juge déconne complètement pour en arriver là, pas vrai ?

—  Enfin… Oui, il a fait une erreur, répondit Packard avec prudence. Mais faudrait pas croire que c’était si facile que ça à plaider et à gagner.

Deems secoua la tête.

—  C’est pas mon avis. Et je suis pas seul à le penser. Il y a un tas de mecs, en taule, qui s’y connaissent en droit. Je leur ai demandé ce qu’ils pensaient de mon affaire. Ils savaient tous que t’allais gagner en appel. Pour eux, à ce qu’ils m’ont dit, c’était du tout cuit. Alors, je me disais que, puisque c’était si facile, tu pourrais me rembourser un peu d’argent sur les honoraires que je t’ai versés.

—  Ça ne marche pas comme ça, Charlie, répondit Packard, en essayant de se persuader qu’il s’embarquait dans une banale discussion d’affaires comme peuvent en avoir deux individus civilisés et d’esprit rationnel. Les honoraires ne sont pas remboursables, et ne dépendent pas des résultats obtenus. Tu ne te souviens pas que nous en avions discuté ensemble ?

—  Je me rappelle, rétorqua Deems avec un bref hochement de tête. Mais tu vois, Bob, je pense à la publicité. C’est sur ta réputation que les clients viennent te trouver, pas vrai ? Et plus les clients sont contents, mieux ça marche pour toi. C’est de la pub gratuite. Alors, ça me ferait plaisir que tu me rembourses la moitié des honoraires.

Packard blêmit.

—  Quinze mille dollars ? Ça m’est impossible, Charlie.

—  Mais si, c’est possible. Et ces quinze mille, si j’ai bonne mémoire, représentent seulement la moitié de l’argent. Le kilo de cocaïne que je t’ai donné a dû te rapporter bien plus, à la revente. J’ai raison, ou pas ? Mais je te demande pas de me rendre la came. Et je veux pas savoir combien t’as gagné avec. T’as tout de même fait du bon boulot pour moi. J’aimerais que tu me rendes l’argent, c’est tout.

La sueur commençait à perler sur la lèvre supérieure de Packard. Il se força à sourire.

—  Tu sors de taule, et je pense bien que tu dois avoir besoin de fric. Si je t’en prêtais un peu ? Mille dollars, ça t’irait ?

—  Sûr. Mais quinze mille m’iraient encore mieux.

Cette fois, Deems ne souriait plus.

—  Impossible, Charlie, répéta Packard, têtu. Quand on a passé un accord, on ne revient pas dessus. Tu étais condamné à mort pour meurtre, et te voici libre. Je peux dire que j’ai bien mérité mes honoraires.

—  Mais oui ! Il y a aucun doute. Et je veux pas te forcer à faire quoi que ce soit. Si tu me rends l’argent, je veux que ça vienne vraiment de toi. Une bonne action, disons, dont tu pourras être fier.

Deems se tut et se laissa aller contre le dossier de son fauteuil. Le cœur de Packard cognait follement contre sa poitrine, et il regrettait la ligne de coke qu’il s’était refusée un instant plus tôt.

—  Dis donc, t’as pas l’air bien. Bob ? dit soudain Charlie Deems. Si c’est comme ça, n’en parlons plus. D’accord ? Parlons d’autre chose. Dis-moi, par exemple : tu aimes les jeux à la télé ?

—  Les jeux ? répéta Packard, décontenancé par le brusque changement de sujet, mais soulagé que Deems ait lâché prise aussi facilement.

—  Oui ! Les jeux !

—  Tu sais, je travaille pendant la journée. J’ai rarement l’occasion de les regarder.

—  Moi non plus, je les regardais jamais, avant d’aller au trou. Mais là-bas, on avait une télé. C’était un de nos grands luxes. Les gardiens nous laissaient regarder les jeux. Pour moi, c’était devenu une vraie drogue. Au début, je trouvais ça nul, mais plus j’en voyais, et plus je comprenais qu’on peut en apprendre autant en regardant les jeux à la télé qu’en allant à l’école. T’as jamais regardé « Le Juste Prix » par exemple ?

—  C’est celui où les gens doivent deviner le prix d’un réfrigérateur ou d’un service de table en porcelaine ?

—  C’est ça ! s’exclama Deems en se redressant sur son siège, un large sourire aux lèvres. (Puis, imitant le présentateur :) Bob Packard, de Portland dans l’Oregon, c’est à vous ! À vous de jouer au « Juste Prix ! » Toi, t’es assis dans le public, et à ce moment-là, tu te lèves et tu t’amènes en courant – tu l’as déjà regardé ?

—  Une ou deux fois.

—  Eh bien, moi, je trouve ça formidable, comme émission, continua Deems avec entrain, parce que ça t’apprend la valeur des choses. Par exemple, si je pose deux cailloux sur ton bureau et que je te demande combien ils valent, tu me répondras qu’ils valent pas grand-chose – pas vrai ? J’ai bien dit deux cailloux. Mais si l’un des cailloux est un bloc de granité ordinaire, et l’autre du diamant ? Tu me suis ? Les deux sont de la même grosseur, mais ton jugement sur leur valeur est carrément différent.

Packard hocha distraitement la tête pour éviter de vexer Deems et jeta un bref coup d’œil à sa montre.

—  C’est très intéressant, Charlie, et je serais ravi de poursuivre cette conversation, mais j’ai une motion à rédiger. Je dois la déposer d’ici deux jours, et c’est un travail assez complexe.

—  Ça, j’en doute pas. Mais je crois que c’est plus important pour toi, au fond, de parler de la valeur des choses.

La peur qu’avait ressentie Packard au début de l’entretien avait disparu, et il ne perçut pas la menace dans le ton de Deems.

—  Où veux-tu en venir, Charlie ? Sois clair.

—  Mais oui ! Tu es un homme très occupé. Je veux pas te faire perdre ton temps. Mais je crois que cette petite discussion t’aidera à voir les choses sous le bon angle. Par exemple, qu’est-ce qui vaut le plus aujourd’hui : une bonne nuit de sommeil, ou les services pourris d’un avocat camé jusqu’aux yeux ?

Packard devint cramoisi.

—  C’est injuste, Charlie. Sans moi, tu serais mort à l’heure qu’il est.

—  Peut-être. Et peut-être que non. Comme je te le disais à l’instant, la plupart des gens à qui j’en ai parlé pensaient que cette affaire était facile à gagner. Ce qui met le prix de tes services très, très en dessous de trente mille dollars. Tu vois ce que je veux dire ? Mais fixer un prix à des abstractions, estimer la valeur d’un travail d’avocat, c’est bien plus difficile que de faire la différence entre le diamant et le granité, Bob. Si tu commençais plutôt par deviner la valeur d’un objet ordinaire, utilisé dans la vie quotidienne ?

—  Ecoute, dit Packard avec humeur, je viens de te dire que je n’avais pas de temps à perdre avec ces idioties.

Deems ne parut pas entendre et tira de sa poche un sous-vêtement féminin, une culotte qui, visiblement, avait déjà servi, et la posa sur le bureau devant Packard. Celui-ci se pencha en avant pour examiner l’objet. Il lui semblait avoir déjà vu cette culotte.

—  Et ça, Bob, ça vaut combien, d’après toi ?

—  Où l’as-tu prise ?

—  On va voir si tu devines. Je peux te donner un indice.

Deems se pencha à son tour, souriant par anticipation à la réaction de Packard, et dit d’une voix haut perchée : « Lâche-moi un peu ! Si t’arrives pas à bander, au moins, laisse-moi dormir ! »

Packard blêmit. Dana, sa femme, lui avait dit cela la nuit précédente, alors qu’il essayait vainement de lui faire l’amour. Et le ton dégoûté était parfaitement imité.

—  Tu sais, Bob, reprit Deems avec un air de feinte commisération, ta technique laisse beaucoup à désirer. Tu t’es même pas occupé des tétons de Dana. Ils sont à croquer, pourtant ! Essaye-les, ce soir. C’est comme les boutons de la radio. Si tu les manipules comme il faut, tu peux tomber sur la bonne station.

Packard, en un éclair, reconnut la culotte que Dana avait retirée la veille au moment où ils se couchaient. Elle l’avait laissée choir au pied du lit. Ce qui signifiait que Deems était entré dans leur chambre au cours de la nuit.

—  Tu étais là ?

—  Eh oui, Bob.

Packard se leva d’un bond.

—  Dis donc, espèce de fumier…

—  Fumier ? l’interrompit Deems d’une voix étonnée. Tu veux donc qu’on se batte ? Voilà qui serait intéressant. La jeunesse et la rapidité contre la taille et la puissance. Mais il faut tout de même que je te donne un conseil, Bob. Si tu commences à te battre avec moi, débrouille-toi pour me tuer. Sinon, je te tomberai dessus tôt ou tard, au moment où tu t’y attendras le moins, et tu finiras comme Harold Shoe.

Packard revit, en un éclair, les photographies de l’autopsie de Shoe. Le médecin légiste avait conclu que l’homme avait subi l’amputation des pieds et des mains à l’aide d’une scie alors qu’il était encore vivant. La colère de l’avocat retomba d’un coup et il se tassa sur son siège. Il luttait vainement pour se donner une contenance, respirant à grands coups sous l’œil attentif et patient de Charlie Deems.

—  Qu’est-ce que tu veux, Charlie ?

—  Je veux que tu joues le jeu. (Le ton était menaçant.) T’as pas vraiment le choix. Alors, combien vaut cette culotte ?

—  Trois dollars cinquante ? Quatre ? risqua Packard. Je n’en sais rien !

—  T’es trop terre à terre, Bob. Pense à la façon dont je me la suis procurée, et tu comprendras sa vraie valeur. Moi, je dirais : le prix de toute une vie de sommeil. Tu crois pas que ça vaut bien quinze mille dollars ? Une vie entière à dormir tranquille, à ce prix-là, c’est encore pas cher !

La mâchoire de Packard se mit à trembler.

—  Charlie, sois raisonnable, supplia-t-il. Je n’ai pas quinze mille dollars à te donner. Tu m’as réglé cette avance il y a un an. Tout est parti, depuis. On pourrait s’entendre à moins ? Trois mille, ça t’irait ? Je peux sans doute les trouver.

—  Voyons, Bob. Trois mille dollars, pour moi, c’est un pourboire.

Packard savait qu’il n’avait pas cette somme. Il était déjà endetté sur son loyer, sur les traites de sa voiture. Puis il songea au prix qu’il serait prêt à donner pour être certain que Charlie Deems ne se glisserait plus jamais dans sa chambre, la nuit, pour l’expédier dans un univers cauchemardesque de torture et de souffrance.

Packard prit le chéquier dans son tiroir. Sa main tremblait si fort que la signature était à peine lisible. Il tendit à Deems le chèque de quinze mille dollars. Deems l’examina, remercia Packard et se dirigea vers la porte. Puis il se retourna, et dit avec un clin d’œil :

—  Dors bien, et gaffe aux punaises !