Le soleil pèse sur les épaules d’Anton. Il se tourne souvent avec inquiétude vers la rue, espérant apercevoir sa femme. Mais cette rue est désespérément vide. A-t-il bien fait de la laisser partir seule ?

Dès qu’il se penche au-dessus de la jeune femme, Anton s’efforce de lui offrir un visage tranquille.

Il cherche à se souvenir d’une berceuse, ou d’un poème. Seuls un chant ou un poème auraient un sens au cœur de ces instants si ténus, si essentiels entre mort ou vie.

Anton scrute sa mémoire, cherche une mélodie ou quelques vers éparpillés. L’angoisse d’avoir perdu Anya l’étreint si fort que la musique et les mots fuient.

Il se met alors à chantonner n’importe quoi.

Marie, les yeux mi-clos, aspire chaque sonorité, capte chaque syllabe.

Anton le ressent. Il chante de mieux en mieux.

Des paroles claires qu’il module à sa façon : des consonnes, des voyelles, des syllabes, de plus en plus scandées et libres.

Anton se laisse aller à son propre rythme. Son corps se balance, son esprit suit.

Une même cadence s’empare de la jeune femme, traverse, par vagues, son immobilité.