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La controverse déclenchée par les autorités religieuses de Mopti autour d’Omar ne tarda pas à s’étendre. Successivement, les imams de Djenné et de Sansanding prirent position contre son hérésie, tandis qu’à Bandiagara et à San on le soutenait chaleureusement. Alkaly Kaba n’avait-il pas lu la sourate IV qui s’ouvre ainsi : « Ô hommes, craignez votre Seigneur qui vous a tous créés d’un seul homme ? » Omar avait donc raison. On était un. Un. Des esprits pointilleux allaient plus loin et jetaient les bases d’une autre hérésie. N’était-on pas un, un avec les Blancs eux-mêmes, les Français que l’on entendait combattre ? Et, du coup, toutes les luttes entre les hommes n’étaient-elles pas fratricides ? Bref, les commentaires allaient bon train. Tiékoro et sa descendance avaient déjà jeté tant de confusion dans la famille que les Traoré, quant à eux, gardaient la tête froide en apprenant que le dernier avatar en était un madhi. Ce qui semblait dangereux, c’est qu’il était en contradiction ouverte avec les résolutions qui avaient été prises à Farako. À présent, l’alliance avec les Français était chose faite. Un officier français agissant au nom du gouverneur du Sénégal avait rencontré Mari Diarra et, lui promettant la restitution de Ségou, avait obtenu l’aide des Bambaras pour une action de grande envergure destinée à chasser les Toucouleurs de la région.

Pourtant, à la réflexion, les stances antifrançaises d’Omar parurent à Mari Diarra et à son entourage de la plus grande utilité. Comme l’accord avec les Français devait rester secret, jusqu’au déclenchement de l’opération, afin de mieux endormir la vigilance des Toucouleurs, n’était-il pas bon, ostensiblement, d’aller à la rencontre d’Omar et de son cortège pour l’assurer d’une totale identité avec ses vues ?

Un groupe de chefs bambaras, parmi lesquels Alioune accompagné de son fils Ali, prit la route de Ouéta où campaient les hommes d’Omar.

La cohorte qui le suivait s’élevait à présent à plus de deux mille hommes sans parler des femmes et des enfants qui naissaient chaque jour. Les parchemins tenus à jour par Idrissa accusaient une forte proportion de migrants venus de l’ouest. Toucouleurs riverains du fleuve Sénégal qui avaient tout perdu quand le Dimar, le Toro, le Lao, le Damga, l’Irlabé étaient devenus protectorats français. Malinkés dont le pays gémissait déjà sous le poids des corvées de portage et de construction des routes et de la voie ferrée. Ouoloffs, Sarakolés qui ne se consolaient pas de la défaite de leur prophète Mamadou Lamine… En fait, les Bambaras étaient la minorité, peut-être parce que la présence de tous ces Toucouleurs les rebutait, même en face d’un ennemi encore plus redoutable. Mais il s’agissait d’une minorité active et agissante. Le madhi que l’on suivait ne se nommait-il pas Traoré ?

En dépit des apparences, l’organisation de ce vaste corps était rigoureuse. Puisqu’on ne possédait pas de chevaux, il ne comptait que des fantassins répartis en trois colonnes selon la nature de leurs armes. Les porteurs de fusils. Les porteurs d’armes blanches et les archers. Des femmes avaient cousu des pavillons. N’ayant pu utiliser le croissant qui figurait déjà sur les étendards toucouleurs, elles y avaient dessiné des rayons représentant symboliquement la « lumière d’Allah », qui était devenu le nom que portait la troupe. Tout ce monde campait sous des tentes, des abris de feuillage ou de nattes de secco, et les Bambaras de la délégation eurent du mal à trouver Omar, assis à l’écart sur un monticule dominant le fleuve, comme si toute cette agitation ne le concernait pas. En fait, Alioune était chargé de tromper Omar et de pratiquer avec lui cette politique du double langage qu’avaient si bien enseignée les Français. Quand il vit ce visage si jeune et pourtant douloureux, marqué du sceau de tortures intérieures, il se fit honte. Il se rappela l’adolescent avantageux qui traînait son fusil par la concession, avant qu’il soit brisé par la mort de Dieudonné, et il lui sembla qu’il méritait d’être traité avec respect. Il attira Ali et lui ordonna :

— Quand nous serons partis, reste avec lui, et dis-lui la vérité.

Omar écouta les paroles élogieuses et reçut les présents, un lot de fusils d’un modèle fort récent sans manifester de reconnaissance. Il ne s’associa pas aux propos injurieux contre les Français tenus par Moussa Samaké qui voulait endormir ses éventuels soupçons et dit :

— Je ne hais pas les Français. Je veux simplement qu’ils quittent notre terre et reprennent le chemin de la mer par lequel ils sont venus.

Moussa Samaké, mécontent, persifla :

— Peut-on se battre sans haine ?

Omar inclina la tête :

— Je le crois.

En fait, il ne se départit de son indifférence qu’à la fin de l’entrevue, qui ne dura pas une heure, quand il se tourna vers Alioune :

— Père, emmène mes enfants et ma femme avec toi. Elle est sur le point d’accoucher, et je voudrais que cet enfant-là naisse chez nous ! Dis-lui que je la rejoindrai dès que cela sera possible…

Quand Ali et Omar demeurèrent seuls, le premier fut pris d’une étrange timidité. Était-ce là l’ancien compagnon de ses parties de wari ? Comme leurs existences avaient pris des chemins différents ! Lui continuait de mener la vie sans responsabilité d’un jeune noble. L’année précédente, la famille l’avait marié, et il avait, en outre, épousé une esclave de case qui lui avait fait un enfant. Comme il n’était pas très religieux, il ne lisait guère et ne faisait pas grand-chose de ses jours. Le destin d’Omar l’emplit d’admiration et il s’écria :

— Ainsi, tu as rencontré Dieu !

Omar haussa les épaules et se leva :

— Allons plutôt nous baigner au fleuve ! C’est ce que je préfère avant la prière de maghreb.

Ali le regarda avec stupeur. Se tremper dans l’eau en plein milieu du jour ! Se prenait-il pour un enfant ou un pêcheur ? Néanmoins, il n’osa pas protester. Est-ce qu’on s’oppose à un madhi ?

Omar se défit de tous ses vêtements, à l’exception de son court pantalon bouffant, et entra lentement dans l’eau. Quoique d’une maigreur squelettique, son corps restait beau, les épaules carrées, le torse long et flexible, les jambes interminables et musclées par les marches incessantes. Il s’abandonna et l’eau le caressa, jouant avec ses parties les plus secrètes, comme une femme qui s’efforce de donner du plaisir. Le regardant, Ali éprouvait, mêlée à l’admiration, une sorte de pitié, car il avait toujours cru que la rencontre avec Dieu se traduit par le bonheur et la paix. Il avait vu des sages assis sur leur natte, dispensant un enseignement, et il lui avait semblé que ceux-là étaient heureux. Or, autour d’Omar se dessinait comme un halo de souffrances. La sainteté peut-elle être souffrance ? Aussitôt qu’il fut sorti de l’eau, il lui jeta :

— Ils t’ont menti. L’accord avec les Français est fait. Un certain Marchand est venu voir notre Mansa. À l’heure qu’il est, la colonne des Français doit avoir quitté Bamako et marche sur Ségou. De notre côté, des milliers d’hommes sont prêts.

S’il pensait provoquer de violentes réactions, il fut déçu, car Omar demeura calme, se rhabillant avec lenteur comme s’il n’avait rien entendu. Puis, il s’assit un peu en contrebas et leva la tête vers son frère :

— J’aimerais comprendre. Qu’est-ce que les Blancs cherchent par ici ? Est-ce que tu l’as compris, toi ?

Ali eut un geste d’ignorance, puis hasarda :

— Ils disent que nous avons besoin de routes et de chevaux de fer. Qu’il faut remplacer le mil par d’autres plantes qui ne nourrissent pas l’homme, mais lui donnent de l’argent. Comme ceci…

Il tira de ses poches quelques pièces d’un métal blanc et les tendit à Omar qui les examina avec le plus grand soin, avant de les lui rendre en riant :

— Eh bien, est-ce pour cela que nous devons mourir ?

Étant donné son âge, Ali n’avait obtenu d’accompagner Alioune qu’à force d’insistance et à cause de sa parenté avec Omar. Brutalement, la lumière se fit en lui. Il revécut sa vie bornée, oisive dans la concession, l’atmosphère d’intrigues stériles de Ségou, et se jeta à genoux :

— Frère, je veux rester avec toi. Tant pis pour les ordres qu’ils nous ont donnés. Je me battrai avec les tiens.

Cette détermination produisit sur Omar un effet stupéfiant. La minute d’avant, il s’interrogeait sur la conduite à suivre, imaginant surtout la déception de ses hommes s’il leur demandait de surseoir au combat. Pour l’éviter, il se demandait s’il ne devrait pas rentrer dans Ségou et mettre le malheureux Madani au courant de ce qui se tramait. Or, cela signifiait trahir les Bambaras, prendre part à des intrigues politiciennes dont il ne voulait à aucun prix. Il se leva et força Ali à se relever :

— Viens. Il faut informer Idrissa !

 

Tête contre tête, le petit groupe d’hommes tenait conseil.

Idrissa avait étalé sur le sol un de ses chers parchemins et essayait de tracer une carte, avec l’aide de tous :

— Ça, c’est le Joliba quand il descend depuis Tombouctou. Nous avons marché trente jours pour arriver à Mopti. Dix pour arriver où nous sommes. Qui sait combien de jours il faut pour arriver à Bamako ?

Sidiki, un Bambara du Bélédougou dont les parents avaient été tués lors de l’attaque contre les Français, et qui avait marché des jours durant pour rejoindre la « lumière d’Allah », se gratta la tête :

— Écoute, cela dépend si tu cours ou si tu ne cours pas !

Malgré le danger imminent, tout le monde rit. Puis Sidiki reprit avec sérieux :

— Dix jours, je crois.

Idrissa interrogea Ali :

— Est-ce que tu sais combien d’hommes ont les Français ?

— Pas exactement. Mais j’ai entendu dire qu’ils allaient emmener beaucoup de ceux qu’ils appellent « auxiliaires indigènes », plus de deux mille ! Et puis, ils ont des canons qu’ils vont faire naviguer par le fleuve… Le plan est que tout le monde se rencontre à Niamina pour marcher sur Ségou…

Omar dit, d’un ton pressant :

— Dans combien de temps ?

Ali eut un geste d’excuse :

— Je ne sais pas. Bien sûr, je n’ai assisté à aucune des réunions secrètes qui se sont tenues à Farako entre le Blanc et nos chefs. C’est seulement ce que j’ai entendu raconter !

Omar fit observer :

— Quand nous parlons de journée de marche, nous parlons d’hommes qui ne sont pas encombrés de munitions, d’armes, de provisions…

Ali l’interrompit :

— Attention, il y a les porteurs. Les Blancs ne portent rien eux-mêmes, ce sont des réquisitionnés dans les villages. Ils suivent avec un peu de retard, ce n’est pas grave !

L’approche du combat avait transformé Omar. On dirait qu’il avait renoncé à s’interroger, et qu’il voyait dans la précipitation des événements la réponse, le signe qu’il attendait en vain depuis si longtemps. Comme si la résolution de son esprit avait modifié son physique, il apparaissait plus grand, plus droit, royal. Idrissa promena la pointe de son pinceau sur le parchemin :

— Admettons que ce soit cela, Niamina, cela, Bamako, cela, Ségou. Nous nous sommes ici… À mon avis, ce serait bon d’aller attaquer ceux de Niamina avant qu’arrive le reste des troupes françaises et les renforts bambaras. Ou plutôt barrer la route de Ségou aux uns et aux autres.

Sidiki haussa les épaules :

— Est-ce que tu sais le chemin qu’ils prendront ?

Omar et Idrissa répondirent d’une même voix :

— Sûrement, ils suivront le fleuve si c’est aussi par cette voie qu’arrivent leurs canons.

Puis ils échangèrent un regard. Regard de l’amitié retrouvée. De la confiance et de la solidarité dans les dangers qu’il faudrait bientôt partager. Thierno, un Toucouleur du Toro, qui souvent avait suppléé aux prêches un peu simplistes d’Omar car sa culture religieuse était immense, proposa avec un peu d’embarras :

— Est-ce qu’il ne faudrait pas mettre Madani en garde contre ce qui se prépare ? Quand on songe à lui, tout seul, coupé des communications avec son père !

Idrissa répliqua, sèchement :

— Sûrement pas ! À la guerre, on ne songe qu’à soi.

Omar baissa les yeux pour cacher son désaccord et fit avec douceur :

— J’y ai pensé, moi aussi. Pourtant, cela ne serait pas prudent. Avec tous ces espions qui poussent dans la rue, entre les maisons, sur les murailles, comment voulez-vous faire parvenir un message secret au palais ?

Thierno n’insista pas davantage, et Idrissa se remit à tripoter ses bouts de parchemin :

— Ce que l’on pourrait faire serait d’envoyer des espions à Niamina pour savoir quand on y attend le reste des troupes ?

Ali fit avec espoir :

— Je pourrai y aller si vous le voulez. On connaît ma famille. Personne ne se méfiera de moi, et, en interrogeant les uns et les autres, je finirai bien par le découvrir. En plus, j’ai un cheval, je pourrai faire l’aller et le retour en moins de deux jours.

Cela semblait une excellente proposition. Aliou, un Malinké du Bakhoy, griot de son état, se leva :

— Laissez-moi l’accompagner…

Et comme le conseil hésitait, il fit d’un ton pressant :

— Avez-vous jamais vu un seigneur aller en guerre sans son griot ?

Au milieu des plaisanteries, Sidiki l’interrogea :

— Mais il va à cheval. Et toi, sur quoi monteras-tu ?

— Je courrai derrière lui comme il convient !

Les deux hommes se précipitèrent au-dehors. Omar sentait bien la peur que cachaient ces rires. Depuis qu’on avait quitté Tacharant, on parlait de se battre. On se répétait les méfaits des Français comme pour ne jamais laisser faiblir l’esprit de vengeance. Néanmoins, tout cela avait quelque chose d’abstrait, de théorique. La plupart des guerriers de la « lumière d’Allah » n’avaient jamais vu de Blancs et se demandaient si, confrontés à eux, leur premier mouvement ne serait pas de terreur. À quoi ressemblaient-ils ? On disait que leur peau n’était pas blanche, mais rouge. Écarlate même. Que leurs cheveux ressemblaient à l’herbe en saison d’hivernage. Que les traits de leurs visages étaient immenses et rigides. Des nez comme des promontoires. Des fronts comme des falaises. Que leurs yeux, scintillant la nuit, glaçaient d’effroi.

Pourtant, cette peur était comme l’envers du courage, le levier qui déclenche l’action, et, loin d’être honteuse, elle était au contraire exaltante. Dehors, quelqu’un donnait le signal de la prière. Le conseil de guerre s’interrompit.

Bientôt, malgré le courant souterrain de la peur, l’annonce que l’on allait enfin se battre galvanisa « la lumière d’Allah ». Sans attendre les directives d’Idrissa, les hommes se mirent à s’entraîner. Les uns mimaient des corps à corps. D’autres faisaient tournoyer leurs haches et leurs sabres. D’autres, enfin, visaient avec des flèches des cibles tracées sur le tronc des arbres. Par manque de munitions, les porteurs de fusil se bornaient à des exercices physiques afin de vérifier leur souplesse et leur agilité.

Vers la fin de l’après-midi, des émissaires apportèrent un don anonyme de fusils assez démodés, mais bien entretenus, et de poudre de guerre. Omar y vit la main d’Alioune, luttant contre son remords. Pourtant, il n’en voulait pas à son père de ce qui pouvait sembler hypocrisie. N’était-il pas le premier hypocrite ? Et la vie n’est-elle un partage inégal entre les affections, les devoirs, les terreurs et les mensonges ? Si ses compagnons étaient pressés d’agir, il les surpassait tous en impatience. Rentré dans sa case de branchages, il l’avait trouvée vide. Kadidja lui avait donc obéi et avait suivi Alioune à Ségou. Qu’il était lâche ! Il n’avait pas pu lui donner cet ordre en face, tout en la mettant dans l’impossibilité de s’y dérober. Qu’il était méprisable ! En même temps, il ressentait un immense soulagement. Elle avait obéi. Alors, elle ne serait plus là à l’interpeller silencieusement du regard :

— Où vas-tu, à présent ? Est-ce que tu es satisfait, maintenant ?

Il pourrait être lui-même son juge et son maître. Elle avait raison, Kadidja, quand elle soutenait qu’il ne lui avait jamais pardonné. C’était la vérité ! Chaque fois qu’il l’avait prise dans ses bras, il s’était souvenu de ces nuits avec elle à Ségou, et, émergeant d’un plaisir qu’il était trop faible pour refuser, il s’attendait à entendre le cri « Qu’on le tue » ou à voir le cadavre du frère bien-aimé tournoyer au faîte du dudale. Chaque fois la repoussant presque avec horreur, il se demandait pourquoi Dieu avait choisi cette victime innocente pour expier son péché. Comment venir à bout du remords ? Cet enfant têtu refuse d’entendre raison. Non, il ne lui avait jamais pardonné ! Et, pourtant, à présent qu’elle était absente, le silence de la case lui permettait de mesurer à nouveau la place qu’elle occupait dans sa vie. Peut-on aimer son péché ? L’aimer et le haïr à la fois ?

Bon, l’heure n’était plus aux interrogations. Bientôt, peut-être, il faudrait regarder la mort en face. Quel visage aurait-elle ? Certains assuraient qu’elle est douce comme une jeune fille nubile aux doigts ourlés de coquillages. D’autres, qu’elle est violente comme une amante. Douce ou violente, il faudrait l’affronter, et Dieu veuille que la dignité l’emporte dans ce face-à-face. Puisqu’il était seul, qu’Awa n’était plus là, il ne pouvait pas contrôler le besoin d’agir qui masquait le vide en lui. Que faire en attendant le retour d’Ali ? Prier ? Il en était bien incapable. Alors s’entraîner comme les autres ?

Autour des tentes hâtivement édifiées, les gens affluaient de toutes parts. Ils avaient appris que la « lumière d’Allah » allait se battre contre les Français et voulaient se joindre à elle. Ses bouts de parchemin à la main, Idrissa s’approcha d’Omar. Avant de répartir ces recrues dans les divers corps de combat, ne serait-il pas bon qu’il s’adresse à elles ? La parole du madhi ne valait-elle pas toutes les exhortations guerrières ?

La première impulsion d’Omar fut de refuser. Mais la vue de tous ces visages fervents, tournés vers lui, l’emplit de pitié et du sentiment d’une responsabilité qu’il devait assumer jusqu’au bout. Pendant un moment, sa langue fut paralysée, et il resta là, silencieux, presque stupide. En face de lui, un groupe de jeunes gens fébriles agitait un étendard. Il joignit les mains, et, venus on ne sait d’où, les mots coulèrent de sa bouche.