Ce qui reste de nos vies
Hemda Horovitz vit sans doute ses derniers jours à l'hôpital de
Jérusalem. Ses deux enfants lui rendent visite mais ce sont bien les
souvenirs du passé qui accompagnent chaque geste, chaque détail au seuil
de la mort. Il y a par exemple l'image de ce lac, près du kibboutz où
Hemda est née, qui s'impose encore avec force à sa conscience. Les
traces plus douloureuses de sa longue vie aussi, qui se glissent dans sa
mémoire sans qu'elle puisse s'en libérer : son père trop exigeant, un
mariage sans amour, puis cette difficulté à aimer équitablement ses deux
enfants, Avner et Dina.
Ces deux derniers passent beaucoup de temps
avec leur mère depuis l'hospitalisation. Avner, le fils adoré, y
rencontre une femme venue dire au revoir à son mari mourant, et entame
une étrange relation avec elle. Quant à Dina, la fille mal aimée, elle
ne sait comment gérer l'éloignement de sa propre fille pour qui elle a
pourtant sacrifié sa carrière. Débordée par le besoin de donner cet
amour à quelqu'un, elle se met en tête d'adopter, envers et contre tous.
Son désir inébranlable de renforcer son foyer pour y accueillir un
autre enfant risque bien de faire éclater sa famille. Zeruya Shalev sait
parler comme personne des relations mystérieuses qui se tissent entre
parents et enfants. Dans une langue puissante, elle évoque la colère, le
ressentiment, la frustration et la peur qui construisent les familles
autant que l'amour et le bonheur d'être ensemble.
Ce qui reste de nos vies est certainement son roman le plus envoûtant.